Le blog de Nicolas de Rouyn

Bonjour.
Ceci est un blog dédié au vin et au monde du vin, qu'on appelle aussi le mondovino. Et à tout ce qui entoure le vin, les belles tables,
les beaux voyages, les tapes dans le dos et les oreilles tirées.
Cela posé, ce qu'on y lit est toujours de-bon-goût-jamais-vulgaire,
ce qui peut plaire à votre mère. Dites-le lui.
(Only dead fish swims in ze stream).
Les photos sont signées Mathieu Garçon, sauf mention. Pour qu'elles soient belles en grand, il suffit de cliquer dessus.
Au fait, il paraît que "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération".
Nicolas de Rouyn



lundi 16 décembre 2013

Le vin agressé par une bande de voyous




Vous ne lisez pas Wine Spectator, cet excellent magazine américain ? Vous avez bien raison. L’auriez-vous fait que, comme moi, l’air vous aurait manqué. Ce journal a publié une interview qui fait suite au scandale provoqué par les tentatives des prohibitionnistes d’interdire l’accès à Internet aux métiers du vin. Au même programme, quelques joyeusetés fiscales que ces lobbyistes, abstinents forcenés, tentent de faire avaliser par le gouvernement. De reculades en promesses opportunes, l’essentiel a été rejeté. Pour l’instant. Mais le bruit provoqué par Vin & Société avec sa campagne « Ce qui va vraiment saouler les Français » pour défendre la filière a interpellé les journalistes du Wine Spec’.
Jamais en retard quand il s'agit de rire de ce qui se passe en France, ils se sont empressés de donner la parole à un certain monsieur Élineau, directeur général de la sinistre ANPAA (Association nationale de prévention de l’alcoolisme et de l’addictologie, organisation richement dotée depuis des années par le Ministère de la Santé pour de bien maigres résultats). Cet inconnu qui aurait mieux fait de le rester s’est offert son quart d’heure de lumière warholienne en tenant des propos sur la filière Vin qui dépassent de beaucoup le cadre de l’acceptable comme celui de ses fonctions.
Ce monsieur a exposé ceci aux journalistes qui l’interrogeaient : « Quand on voit ce qu’il se passe avec les sites pro-nazis, on comprend qu’il y a des moyens de réagir ». Plus avant dans l’interview, Élineau évoque, comme pour justifier ses visées, la censure du gouvernement chinois à l’encontre des dissidents et celle de l’Australie contre la pédophilie et la pornographie pour expliquer qu’il faut intervenir pour mettre un terme aux échanges d’opinions œnophiles sur les réseaux sociaux et les blogs. Pour qualifier la saillie de cet Élineau, un éditorialiste de l’hebdo Le Point a finement appelé Francis Blanche à la rescousse et exhumé cette ligne magnifique qui éclaire le cas Élineau d'une lumière de bon sens : « Il ne suffit pas d'être inutile. Encore faut-il être odieux. »
Les propos détestables de cet individu, tenus dans le plus important magazine du plus important marché d’export du vin français, n’ont eu aucun écho en France.
Pourquoi ?
Pourquoi accorde-t-on plus d’espace à l’anecdotique Leonarda qu’à l’excellence d’une filière agricole qui emploie 500 000 personnes et qui est le deuxième secteur export français ?
Au bénéfice de qui l’ANPAA s’exprime-t-elle ?
De mois en mois, des études nouvelles en provenance des pays normaux mettent en lumière les qualités sanitaires du vin consommé modérément. Ce n’est donc pas de santé publique qu’il s’agit.
De quels autres lobbies, l’ANPAA est-elle la complice ?
Élineau n’a pas été sanctionné par sa hiérarchie qui s’est, en plus, permis d’insinuer que les propos avaient été déformés. Juste insinuer, ils ne peuvent pas accuser des journalistes américains qui ont probablement l’enregistrement de l’interview et ne sont pas du genre à se laisser faire.
À part un ou deux patrons d’interprofessions qui ont eu la décence de s’émouvoir, personne ne s’est élevé officiellement contre ces déclarations scandaleuses. Imaginez une seconde qu’un lobbyiste s’en prenne à tout un métier et voyez d’ici le tollé, les cris d’orfraie, l'indignation en bandoulière. Dites que les routiers sont des chauffards et des pollueurs et dans les 24 heures, c’est l’explosion, les autoroutes bloquées, le gouvernement qui en appelle à la responsabilité, surjoue l’apaisement, quelqu’un s’excuse, on se calme.
Là, rien.
Pourquoi ce silence coupable de medias d’ordinaire si prompts à piapiater chaque fois qu’une mouche s’écrase sur un pare-brise ? Pour préparer quels lendemains qui déchantent forcément ?

Peu de jours après la publication des injures de ce grossier personnage, un communiqué des services des douanes nous apprend que le vin français vient d’aligner un énième record à l’export. Pas un seul homme politique français n’a pris la parole pour s’en féliciter et donner à la filière un gage de reconnaissance. Par les temps qui courent, il me semble qu’un petit bout de paix sociale serait le bienvenu. Dans ce sens, affirmer vite et clairement que le vin fait partie intégrante du patrimoine culturel et économique de notre pays ne me semble pas une idée dévastatrice pour l’équilibre sanitaire de la société française.



La photo : cette image amusante a été trouvée sur Facebook.
Cet article a été publié dans le n°15 de Vigneron, le magazine le plus chic du mondovino, en vente chez les meilleurs marchands de journaux. Ceci explique pourquoi je publie aujourd'hui seulement cette info qui a déjà deux mois.
Pour vous repérer parmi toutes les couvertures de journaux du kiosque, voici celle de Vigneron :



13 commentaires:

  1. 1. Une plainte ne devrait-elle pas être déposée ? Ne s'agit il pas la de diffamation et d'insultes gratuites ?

    2. Ce monsieur ne devrait-il pas être sanctionné par sa hierarchie ? Est elle au courant, est-elle solidaire ?

    3. Mais bon sang, c'est avec nos impôts qu'on paye ce genre de c....... !?

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    1. Oui, monsieur, c'est avec vos impôts, les miens et quelques autres (il faut quand même quelques contribuables pour rassembler 200 millions d'euros)

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  2. C'est habiter sur une autre planète que de pas avoir lu les nombreuses réactions véhémentes suite à cet interview du sinistre Elineau , émanant de parlementaires, journalsites, élus et autres responsables vignerons ... et heureusement encore ....

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    1. Je vous confirme que je suis domicilié sur la planète Terre et que j'ai vu très peu de réactions. Deux patrons d'interprofessions, dont un bien timide. Un journaliste au Point, un autre à la RVF. Pas de parlementaire. Il se peut que j'ai raté quelque chose, cela dit. Mais ce n'est pas le tollé habituel des professionnels de l'indignation.

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  3. Mais si, Marc a raison… De nombreuses réactions sur les "réseaux sociaux" comme on dit, sur les blogs (le 17 Octobre dernier, par exemple, sur les 5duVin http://les5duvin.wordpress.com/2013/10/17/au-moins-nos-enfants-sauront/) aussi et dans la Presse. Le dernier en date : un édito assez véhément de Bertrand Collard dans La Vigne parlant de "Propos révoltants". Jacques Berthomeau sur son blog a dit ce qu'il pensait, Vincent Pousson itou. Et puis, tu sais bien que les mensuels et bimensuels ont de tels délais de parution qui font se décaler l'info… Quoiqu'il en soit, bien que tardive, je suis ravi de lire ton indignation.

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    1. Si les 5 du vin et Berthomeau te semblent l'alpha et l'omega de l'info, très bien, moi pas. Je n'ai rien vu sur les grands medias toujours les premiers à dénoncer l'inacceptable, sauf là.
      Pour mon "indignation tardive", je te renvoie aux délais que tu évoques. J'ai remis le texte quand l'affaire est sortie, deux mois avant la prochaine parution. C'est comme ça, tu ne l'ignores pas.

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  4. Je suis tout á fait d'accord avec cet article... Pas beaucoup de soutien á cette filiére performante en France dans les médias de masse! Les journalistes, d'un coté, ca ne m'étonne pas tant que ca, ca fait bien longtemps qu'ils ne font plus leur job, mais que des politiques ne s'élevent pas pour défendre un pole d'excellence dans ces temps de recor de marasme, c'est encore une preuve qu'ils se foutent bien de notre pays!
    A moins que ca gene une partie de la population qui a décidément du mal á accepter la culture francaise et dont nos politiques ne cessent de lecher les bottes pour les compter parmi leurs électeurs?
    La prochaine étape sans doute, pour la bonne santé de nos concitoyens bien entendu, ce sera une campagne contre les méfaits du cochon, gros pourvoyeur de maladies cardio vasculaire! Ce pays me dégoute un peu plus tous les jours...

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  5. Concernant l'ANPAA, il faut savoir que ces tristes sires officient aussi en milieu scolaire. Par le passé, j'avais accepté leurs interventions sur les dangers du tabac. Mais, j'ai pu voir ce qu'ils présentent pour évoquer les dangers de l'alcool et bien évidemment ils utilisent des images telles que des bouteilles de vin, des fûts etc... Le procédé est honteux et malhonnête, a fortiori pour l'amateur de vins que je suis. De plus, l'intervenant était particulièrement nul !
    En conséquence, l'ANPAA ne mettra plus jamais "les pieds" dans ma classe et je ne ménagerai pas mes efforts pour informer mes collègues du pouvoir de nuisance de cette association hygiéniste !
    Philippe V.

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    1. Prohibitionniste, Philippe. Pas hygiéniste. Ces gens ne font rien pour l'hygiène publique. Regardez le développement du binge-drinking, pour lutter contre, ils agressent la filière Vin !

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    2. Prohibitionniste est bien le mot juste. Merci Nicolas de l'avoir précisé. De plus, je suis d'autant plus agacé quand j'apprends que leurs prestations en milieu scolaire sont payées. Nous avons parfois beaucoup de difficultés pour financer de vrais projets pédagogiques intéressants et l'institution (l'Education Nationale) ne trouve rien de mieux à faire que de verser quelques subsides à une association par ailleurs largement subventionnée.... ! Grrrrrr
      Philippe V.

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    3. Merci de l'info. J'ignorais que leurs prestations étaient payées. De plus en plus fort !

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    4. Je pense que tout est question d'éducation dans ce domaine comme dans d'autres. Il est normal que les instances aient en charge d'informer les jeunes sur les dangers de la drogue, du tabac ou de l'alcool.
      Mais il serait bien plus intelligent de consacrer du temps sous forme d'atelier par exemple pour leur enseigner ce qui nous pousse á aimer l'univers du vin mais qui ne fait pas pour autant de nous des accros á l'alcool!
      Les aromes du vin, la palette gustative, les sensations de la dégustation, accompagnés de l'histoire et du travail de ces nectars dans notre culture feraient que les jeunes, d'eux meme, mettraient la juste mesure de modération á ce plaisir autrement plus convivial que les chats sur Internet (sauf ici bien sur!)!
      Je pense que des gens bien informés sont plus intelligents que des gens non informés!
      Mais c'est plus facile de faire dans le raccourcis je vous l'accorde...

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  6. Pourquoi ne pas les occuper, ces tristes personnages prohibitionnistes, en leur demandant d'aller faire des campagnes d'information sur les dangers de la drogue qui y circule par wagons entiers, dans les citées de nos banlieues? Leur sort serait vite réglé, et nous épicuriens qui n'avons pas grand chose de sympa pour nous réjouir dans cette période de disette, nous pourrions enfin vivre notre plaisir culturel un peu tranquilles... :-))

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