Le blog de Nicolas de Rouyn

Bonjour.
Ceci est un blog dédié au vin et au monde du vin, qu'on appelle aussi le mondovino. Et à tout ce qui entoure le vin, les belles tables,
les beaux voyages, les tapes dans le dos et les oreilles tirées.
Cela posé, ce qu'on y lit est toujours de-bon-goût-jamais-vulgaire,
ce qui peut plaire à votre mère. Dites-le lui.
(Only dead fish swims in ze stream).
Les photos sont signées Mathieu Garçon, sauf mention. Pour qu'elles soient belles en grand, il suffit de cliquer dessus.
Au fait, il paraît que "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération".
Nicolas de Rouyn



dimanche 31 mai 2015

Vous n’avez pas tout bu, voilà le WineLab 2




Le WineLab 2 ouvre ses portes demain matin à 10:30 au Carreau du Temple. Là, 150 vignerons présenteront 450 vins.
Le monde du vin n’a jamais autant fourmillé d’initiatives et d’expériences à même de séduire la curiosité et l’intérêt des amateurs comme, d’abord, des professionnels. Cette diversité inventive et savoureuse a été le premier critère de sélection pour l’équipe de Bettane+Desseauve.

De l’Afrique du Sud à l’Allemagne en passant par le Douro au Portugal, cinq régions d’Italie et, bien sûr, toute la France, le choix est vaste de ces vins moins connus, abordables (une constante au WineLab), prêts à boire et délicieux. Nous avons étendu la portée des radars et c’est bien comme ça. 

Cette année, le WineLab est réservé aux professionnels jusqu’à 16:30 et ouvert aux amateurs à ce moment. Pour les uns, comme pour les autres, MasterClass en continu baptisée ici ChronoLab. 

Réservation en ligne indispensable, comme toujours. C’est ici (clic).





mercredi 27 mai 2015

La critique d’une seule voix


Les commissaires politiques, main dans la main avec la police des mœurs, nous ont fourni un bel exemple d’indignation sélective en même temps qu’une bonne tranche de rire, le week-end dernier
Ce vendredi, déjeuner aimable avec une longue jeune fille émouvante. On boit une bouteille de gevrey de chez Trapet, puis le patron du restaurant nous propose un verre de chenin du château de Fosse-Sèche. 



Ce vin était mort, faute d’avoir été protégé. De mauvais arômes de pomme blette sur un jus gazeux. Agacé par ce vin sottement foutu, je m’en ouvre d’un tweet repris sur Facebook.
Seulement voilà. Le vigneron fait partie de cette mouvance politiquement correcte très en vogue sur les réseaux sociaux. Touche pas à mon dogme.
Là, les indignés de service s’en sont donné à cœur joie, arguant du fait qu’il est littéralement interdit de mal juger un vin « naturel » (je mets des guillemets à « naturel » pour faire valoir le hold-up sémantique) (comme si les autres étaient en plastique ou que sais-je).
Pour faire bonne mesure, le vigneron s’en est mêlé, expliquant au monde comme il travaillait beaucoup et à moi, quel culot j’avais de n’en tenir aucun compte, laissant entendre que vu du fauteuil de mon bureau, c’était pas comme un coucher de soleil sur les vignes au soir d’une longue journée de travail.
J’adore ces gens qui croient toujours être les seuls à travailler, comme les livreurs qui bouchent les rues en hurlant « Je travaille, moi ! ». Le travail, aussi important soit-il, ne justifie rien sauf, peut-être, la réussite. Ce n’était pas le cas. Vous, je ne sais pas, mais moi, si le résultat d’heures de travail débouche sur un résultat moyen, ce qui peut arriver évidemment, je recommence en tirant profit de la leçon, de l’expérience. Lui, nan. Bon. Il oublie juste que quiconque développe une activité qui requiert l’adhésion du public s’expose à des rejets.

Sur les réseaux sociaux, les petits inquisiteurs se permettent de vomir sur les plus grands vins produits par les meilleurs vignerons du monde, des vins qu’ils ne boivent jamais évidemment. N’importe quel ahuri doté d’une connexion internet peut se répandre et expliquer au monde quel mauvais angélus – cheval – haut-brion il a bu (il y a longtemps). Mais se plaindre d’un blanc raté par un naturiste, non. On m’a expliqué que j’étais le plus mauvais dégustateur du monde, que je m’étais trompé, que je n’avais pas reconnu la pépite sous sa gangue de merde. J’ai cru rêver.
Pas besoin d’être grand clerc pour reconnaître des arômes de pomme blette, n’importe quel enfant de huit ans ayant passé quinze jours à la campagne avec sa grand-mère sait les reconnaître. Pour le gaz dans la boisson gazeuse, pareil.
Et je ne prends pas pour normal qu’un vin sans soufre ajouté se barre dans tous les sens. Ça pose un énorme problème de respect du consommateur, de l’acheteur. Et un problème de savoir-faire, bien sûr. Jouer avec le soufre et avec succès demande un doigté et une technique qui n’est, visiblement, pas l’apanage de tous.

Le plus violent, comme toujours, c’est l’innommable Papy Zinzin qui, sur son blog pourri, m’insulte gravement parce que j’ai esquissé l’ombre d’un jeu de mots sur le patronyme dudit vigneron. Il s’appelle Pire.
Je conseille à l’odieux vieillard de relire ses logorrhées et se souvenir enfin, avant de l’ouvrir, de ce qu’il fait depuis des mois, sinon des années, de mon patronyme à moi. Et si ce monsieur Pire a, comme moi, traversé des années de cour de récré, il est largement vacciné contre ce genre d’humour, comme moi. Rien de grave, en somme.

Et pour finir sur une note sérieuse, voici un extrait d’un mail reçu hier d’un ami du vignoble : « Grace a toi j'ai appris que le décès d'un père excuse la commercialisation d'un vin mauvais. Je regrette de ne pas l'avoir su à l'époque des obsèques du mien. Je n'ai pas pu en profiter.
(…) jouer sur les sentiments avec des arguments qui n'ont rien a voir avec le problème. Et avec le fait qu'il faut tout pardonner dans la médiocrité. Pendant ce temps, il occulte les vraies questions de fond. »

Merci de ton soutien, l’ami.
Mais la question reste pendante. Peut-on critiquer un vin adoubé par la patrouille du PC* ? Faut-il ne critiquer que les vins produits par de grands domaines riches ? Et, si oui, riches comment ? Plus riches que qui ? L’absence de soufre dans un vin cloue-t-elle automatiquement le bec du commentateur ? Le mot « naturel » est-il une garantie de qualité et, si oui, de quel droit ?
Bref, il y a de quoi débattre.

Enfin, j’adresse ce message personnel à cette population qui défend la pensée unique avec de telles œillères :








*PC : Politiquement Correct

mercredi 20 mai 2015

Primeurs 2014, les prix « français »


Chez Bernard Magrez, 2014 sort au même prix que 2013, déjà inférieur à 12 et 11 et notre homme annonce : « Nous sommes les seuls à Bordeaux à proposer des prix en 2014, 2013, 2012 et 2011 inférieurs à nos cotations de 2008. » C’est joli. Il faut dire aussi que proposer pape-clément 2014 à 57 euros HT, c’est très amateur-friendly.

Chez les autres, le très attendu Fieuzal sort son blanc à 31,75 euros HT. Là aussi, on est dans le grand vin à prix « français ».

Pour finir cette session, le cru classé de Pauillac du château Pédesclaux à 29 euros HT est sans doute l’une des dernières occasions de voir ce beau vin à ce point abordable. On n'est pas loin du best buy du millésime. Dans les années qui viennent, il va de soi que le tarif va augmenter au rythme de la progression du cru et Jacky Lorenzetti a tout mis en œuvre pour accélérer le mouvement. Et, déjà, c’est très bon.

Pour finir  sur une note de gaieté, voici une photo d’un champagne blanc de blancs posé sur un déjeuner mémorable. Quelle finesse.






mercredi 13 mai 2015

La fin de la liste de ses envies de bordeaux

Tout doucement, le rideau tombe sur les primeurs 2014. Carmes Haut-Brion est enfin sorti ce matin. 39 euros HT, prix public. Ah, quand même, c’était 34 pour le 2013. Ce vin a fait l’unanimité parmi les grands dégustateurs présents à Bordeaux à ce moment-là.
Le commentaire de Bettane + Desseauve :
« 54 % de cabernet franc non éraflé, 32 % de merlot, le reste en cabernet-sauvignon, un travail précis et original qui paie. Très belle saveur florale, grain de tannin surfin, longueur onctueuse, grand volume profond et intense, avec une tension saline raffinée. Cela ira loin et possède d’ores et déjà une personnalité rare. 95 (ou 18/20) »
Pour Michel Bettane, il n’y a pas de secret. Ce qui dure demande des idées et du travail.

Une bouteille bue au château avec Anne, Yseult, Jean-Antoine et Guillaume.


Parmi les autres sorties, j’ai eu envie de :
- Château Potensac, le médoc des gens de Léoville-Las-Cases, 15,80 euros HT
- Château Corbin, le joli saint-émilion d’Anabelle Cruse, 20 euros HT
- Château Calon-Ségur, saint-estèphe, comme tous les ans, indispensable, 49 euros HT.

Et pour être complet, j’ajoute un blanc de Pessac-Léognan, celui de mon cher ami Stephen Carrier au Château de Fieuzal (pas encore sorti, ça ne dépassera pas ou peu les 35 euros HT et ce blanc est un tel bonheur que…).

Les prix indiqués ont été relevés sur le site ChateauPrimeur du groupe Duclot (clic)

Pour consulter les 650 primeurs commentés et notés par Bettane+Desseauve ou juste celui qui vous intéresse le plus : (clic)

lundi 11 mai 2015

L’argent, les primeurs, deux mots

Les primeurs de Bordeaux sortent, paisibles. Doucement le matin, pas trop vite l’après-midi. Cinq ou six par jour, pas tous les jours. Certains attendent. Quoi ? Je me le demanderai encore longtemps. Nous attendons tous la sortie de Carmes Haut-Brion, le chouchou de la Semaine des primeurs, mais voilà, il a fait beau sur le Ferret.

Bref, en ce moment, nos bordeaux parlent d’argent et ça couine dans les chaumières. Tel ou tel y va de son propos aigre-aigre, dénigrant comme il peut, se scandalisant à bon compte (c’est le cas de le dire), mais rien ne change. Les gens sont amateurs de primeurs. Peut-être moins qu’avant, mais qu’un vin sorte à bon prix et c’est la ruée. Ce qui renvoie les Cassandre à leurs tristes calculs.
Et pendant que se passent ces agitations sans objet, le commerce continue comme devant.
Un exemple.
Une caisse de quatre millésimes de chez Jayer.
L’icône Henri, pas la famille.
Le cros-parantoux, le drapeau d’un peuple tout entier, l’emblème d’une nation quasiment.
Trois bouteilles de1997, cinq 98, une 99 et trois 01. La caisse de douze, quoi.
Le prix : 84 600 euros hors taxe la caisse. Avec la TVA, on passe la barre des
100 000 euros. Pas mal, non ? Sur la capture d'écran ci-dessous, les prix sont exprimés par bouteille :

Extrait du mail tombé dans ma boîte (cliquez sur l'image pour l'agrandir)


Mais Nicolas, comment peux-tu comparer l’incomparable ? Déjà, on m’objecte mille arguties, dont la rareté. Go sit on a cactus. Ces très grands vins français sont montés tout en haut de l’échelle des prix. Ils n’en redescendront plus ou au hasard d’une enchère, mais pas de manière significative. Un grand petrus dans un grand millésime et avec une garantie de provenance à peu près sérieuse atteint parfois ces prix-là et c’est aussi rare qu’un Jayer ou à peu près. Et tous les vins émouvants coûtent de l'argent dès qu'ils ont trois points de notoriété. Comment blâmer les producteurs ?
Sinon, les bordeaux 2014, eux, ne sont pas chers à ce point et il semble qu’en plus, cette année, ils collent assez bien au marché. Lequel a quand même fait un effort pour comprendre et rééchelonner ses illusions.

Si vous êtes un riche collectionneur malais, on peut craindre que tout ce qui précède vous endort, non ?



mercredi 6 mai 2015

Primeurs 2014, la liste de mes envies en or

L’or dont il s’agit est celui des vins d’or de Sauternes et de Barsac.
Parmi ce qui sort ces jours-ci, il y a des merveilles. Presque tout est sorti, sauf le haut du panier, Yquem, Climens, Fargues, mais qui ne seront bien sûr pas les affaires du siècle en termes de prix.
Voici mon choix perso. Agrémenté des commentaires et notes de Bettane + Desseauve (essentiellement Michel Bettane).

Barsac
- Château Doisy-Daëne
Riche, très frais sur le plan aromatique, énergique, plus long que large. 17,5 ou 94 (28,60 euros, CP)
- Château Coutet
Grande richesse en liqueur, opulent et racé, longue garde prévisible. 18 ou 95 (28,20 euros CP)

Sauternes
- Château Lafaurie-Peyraguey
Somptueuse matière, grand raffinement aromatique, le plus distingué des vins récents du château à sa naissance et une réussite majeure dans le millésime. 18,5 ou 96 (40 euros, CP)
- Clos- Haut-Peyraguey
Puissant, parfaitement « rôti » ; large dimension et grand potentiel de garde. 17 ou 93 (25,90 euros, VB)
- Château de Malle
Beau rôti, beaucoup de charme et de présence immédiate. 16,5 ou 92 (27,40 euros, VB)

Et il y a Guiraud, un favori de ce blog. Il n’a pas été commenté pour l’instant en raison d’échantillons qui ne convenaient pas, mais on ne peut pas penser qu’il ait dérogé à ses principes d’excellence. (35, 50 euros, CP)
Dans le genre vin en or, Pichon-Longueville-Baron est sorti hier à 76 euros. C’est l’un des grands vins du millésime et ce matin, il était déjà épuisé à peu près partout.

Non seulement Château Gilette n'est jamais vendu en primeurs,
mais en plus il n'est mis sur le marché qu'au bout de vingt ans d'élevage.


Tous les prix sont indiqués HT
CP = Chateauprimeur (clic)
VB = Vinothèque de Bordeaux (clic)



dimanche 3 mai 2015

Joseph Henriot, ses Enchanteleurs,
ses beaunes et ses bateaux

Un soir de pluie, une paire d’amis, deux ou trois bouteilles, des choses à goûter, d’autres à boire. Commencer avec un petit champagne rosé assez bon, dans son honnêteté simple. Suivre avec ce magnifique simone blanc 06, peut-être encore un peu jeune pour donner tout ce que j’en attends, je tiens le simone blanc pour l’un des vingt grands blancs du monde. Le modèle d’après était un smith-haut-lafitte rouge 01 d’une absolue perfection dans son raffinement et la subtilité de ses arômes de truffe noire.
Après dîner, au lieu d’un sauternes de belle origine, nous avons choisi cette Cuvée des Enchanteleurs 96 des champagnes Henriot. Au-delà des qualités de ce vin fin et savoureux, l’idée était de célébrer la mémoire de Joseph Henriot, disparu lundi dernier. Évoquer son souvenir, c’est aussi se raconter encore une fois son parcours hors-norme, de Charles Heidsieck puis Veuve-Clicquot à l’établissement de son empire. Cette manière qu’il avait de croire d’abord en son étoile, cette capacité à être fort et à savoir dire non, par pure loyauté.
Et à réussir ce qu’il entreprenait à l’écart des modes, mais jamais loin des tendances en n’oubliant pas que le monde attendait des grands vins et qu’il fallait les faire, ces grands vins. Thierry Desseauve rappelait cette semaine sur le site MyBettaneDesseauve (clic) le credo de Joseph Henriot : « La quantité n’a aucune importance à mes yeux. Je veux faire les meilleurs vins possibles sur les plus grands crus. » La manière et la rapidité avec lesquelles il a redressé la maison Bouchard Père et Fils, égarée un temps dans la course aux volumes, en est le plus intense témoignage. Cuve 38, ce champagne de solera initié en 1990 et lancé l’an dernier, en est un autre (clic).

Les souvenirs des moments forts partagés avec lui, chacun dans son rôle, quand deux ou trois hurluberlus tentaient, en vain, d’appeler au boycott (clic) des chablis William Fèvre, propriété de son groupe. Ou d’autres, encore plus forts, quand il ouvrait dans sa maison de Beaune des beaunes Vigne de l’Enfant-Jésus 1961 (clic) ou 1891, le seul vin du XIXe siècle dont j’ai bu deux verres (clic).

Et puis, raconter aux amis ce qui ne se sait pas, Joseph Henriot et l’aventure de Charles Heidsieck III, le bateau de course sponsoré par lui et skippé par Alain Gabbay, deuxième de la Whitbread, course autour du monde en équipage. La façon dont il avait fait confiance à une bande de jeunes furieux et, surtout, comment il les avait suivis, une fois l’aventure terminée et le bateau vendu. Comment il a entretenu sur sa cassette personnelle chacun des membres de l’équipage, certains pendant dix ans, payant les études de l’un, les cours de pilotage de l’autre, etc. et comment il n’en a jamais parlé à personne. Ce comportement exemplaire.
Ne dites jamais de mal de Joseph Henriot sur le quai de La Trinité, vous finiriez dans le port.