Le blog de Nicolas de Rouyn

Bonjour.
Ceci est un blog dédié au vin et au monde du vin, qu'on appelle aussi le mondovino. Et à tout ce qui entoure le vin, les belles tables,
les beaux voyages, les tapes dans le dos et les oreilles tirées.
Cela posé, ce qu'on y lit est toujours de-bon-goût-jamais-vulgaire,
ce qui peut plaire à votre mère. Dites-le lui.
(Only dead fish swims in ze stream).
Les photos sont signées Mathieu Garçon, sauf mention. Pour qu'elles soient belles en grand, il suffit de cliquer dessus.
Au fait, il paraît que "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération".
Nicolas de Rouyn



mardi 27 octobre 2015

La téci du vin

Il y avait la Cité des civilisations du vin. Un projet ambitieux logé dans une architecture contemporaine qui ne l’est pas moins. Seulement voilà, un doute a germé dans un esprit faible, des études ont été lancées. Et le mot « civilisations » a zappé, victime des décideurs. Pourquoi ?
Voici un extrait du dossier de presse :
« Ces études ont montré de façon unanime la nécessité d’une évolution du nom de marque, jugé trop peu mémorisable et antinomique avec la modernité du projet. À l’inverse, le terme Cité a lui été plébiscité et jugé porteur des valeurs de partage, d’ouverture et d’accessibilité qui définissent le projet. » 
Comme ça, c’est dit, la ville d’Alain Juppé (c’est lui qui décide) trouve que
« civilisations », c’est pas moderne. Aujourd’hui, au moment où nous avons tous besoin de plus de civilisation, l’édile enterre le mot et fait dire aux études que
« cité », ça, c’est du concept moderne. Hallucination collective ? Mais non, clientélisme de base sans idée ni courage.
Ensemble et désespérés, rions. C’est tout ce qui nous reste avant l’inauguration de la téci du vin.

Au moins, ils auraient pu remettre dans la base-line le mot civilisations, avec un s, s'il le faut absolument. Ben non, cultures avec un s aussi. Bien sûr.



mardi 20 octobre 2015

Mouton 2013, la nouvelle étiquette

Depuis le temps, depuis l’étiquette au V de la victoire en 1945, on a fini par trouver ça normal. Il se trouve que ça ne l’est pas. Sur la période, la somme d’œuvres imprimées sur les étiquettes du premier cru de Mouton-Rothschild est impressionnante. Elle est généreuse aussi et visionnaire, une sorte de survol bien vu des secousses artistiques du temps, sans beaucoup d’équivalent. On ne parle pas de démocratisation de l’art contemporain, on pourrait en prenant un peu d’altitude. En tous cas, la continuité sans faille sur plusieurs décennies est belle et la collection, unique.

L’étiquette de mouton 2013 a été réalisée par un artiste plasticien et philosophe d’origine coréenne. Il s’appelle Lee Ufan et connaît, à près de 80 ans, une notoriété nouvelle dans le monde enchanté des grands vins. Mais, déjà, il est connu pour être l’artiste le plus coté du groupe japonais Mono Ha (L’école des choses), aussi coréen soit-il. Il est qualifié d’artiste « minimaliste », ce que cette étiquette confirme, il est aussi un land-artiste très puissant.
Vive l’art contemporain.

Voilà l’étiquette :







mardi 13 octobre 2015

Quintus, le fait du prince

Une nouvelle marque dans le ciel de Saint-Émilion ne peut pas être une histoire banale. Celle-ci, vraiment pas.
 
Les faits 
La société familiale Domaine Clarence Dillon, propriétaire de Haut-Brion et de La Mission Haut-Brion, représentée par son président le prince Robert de Luxembourg, acquiert d’abord le Château Tertre-Daugay qui devient Château Quintus. Pour pousser le bouchon un peu plus loin et couvrir les quatre points cardinaux dans une continuité territoriale, il achète deux ans plus tard le fameux Château L’Arrosée. Ainsi, Château Quintus couvre 28 hectares d’un seul tenant sur les quatre expositions et deux types de sols : les coteaux calcaires, au sud et la pente argilo-calcaire au nord qui se finit en graviers, puis en « toutes, toutes petites graves » (Pierre Lurton cité dans un grand éclat de rire par Jean-Philippe Delmas, le boss des domaines Clarence Dillon). Du sable, quoi. Les bâtiments de Tertre-Daugay coiffent le paysage à 360 ° et à 62 mètres d’altitude. La vue est splendide, sans doute la plus belle de tout le Bordelais. En plus, un bois de chênes, des bosquets de charmes, d’acacias et de saules assurent une biodiversité inhabituelle. Un modèle de vignoble.

Les vins 
La nouvelle entité produit château-quintus, le grand vin et un second vin, Le dragon de Quintus. Aujourd’hui, le premier vin représente environ 25 % de la production, signe d’un niveau d’exigence très élevé. L’outil de production est en cours de rénovation (accélérée). On sent bien que l’arrivée dans la famille Haut-Brion de ce saint-émilion lui impose un standard d’excellence certain. Pour avoir goûté souvent le château-l’arrosée, dont deux fantastiques 64 et 05 la semaine dernière, je ne suis pas très inquiet sur l’avenir gustatif de ce château-quintus.

Une question 
En débaptisant Tertre-Daugay et L’Arrosée, deux crus classés de Saint-Émilion, le prince perd le classement de facto. Cet avantage commercial tombe à l’eau en toute connaissance de cause. Château-quintus est un saint-émilion grand cru, rien d’autre. Certes, on connaît d’autres exemples très glorieux (Tertre-Rotebœuf), mais quand même, il faut une sacrée dose de confiance en soi et en ses équipes pour s’asseoir sur le classement. Ou ne pas croire du tout à la pérennité et/ou à l’intérêt d’un tel classement ? On verra bien.

L'étiquette de Quintus. Le logo représente un dragon ailé
posé sur une tour de guet (Daugay)



mardi 6 octobre 2015

Le jour où j’ai compris les zadistes

Vous l’avez lu partout, la ligne à grande vitesse va donc perforer le Ciron, cette toute petite rivière indispensable à l’élaboration du sauternes (c’est parce qu’elle provoque des brumes et brouillards les matins en fin d'été que se développe le botrytis sur les baies des vignes du Sauternais).
Pourtant, les autorités de l’État (la Cour des comptes) ou mandatée par celui-ci (Commission d’enquête publique) avaient conclu à l’inutilité coûteuse du projet, appuyées en cela par une consultation populaire qui avait réuni 14 000 signatures contre cette imbécilité. Oui, mais l’État s’assied sur ces recommandations, l’État se moque bien de l’avis du peuple, comme il se moque du vignoble, l’État s’en fout parce que ses représentants y voient d’autres intérêts, plus personnels, donc plus importants que l’intérêt public. En une touchante démonstration d’œcuménisme, la droite et la gauche locale, bordelaise, se sont congratulées après la décision du régime.
L’impéritie de ce gouvernement, largement démontrée, trouve ici une nouvelle expression et la ministre de l’Écologie, une nouvelle occasion de se taire, elle n’est plus à un renoncement près. On invoque le Progrès, comme autrefois ; on nous assène que l’Europe est pour et que c’est bien la preuve. J’ai même entendu un menteur dire sans rire devant une caméra que cela allait diminuer le trafic routier. Comme si les TGV embarquait du fret. Même la Poste a cessé de les utiliser.
Le problème, c’est la survie du sauternes, ce vin prodigieux, et du Sauternais, ce terroir si fragile. Là encore, le régime s’en fout. Là encore, la filière est bien peu mobilisée. Aujourd’hui, c’est Sauternes. Et demain, une centrale atomique sur le Rhône ? Ah non, il y en a déjà. La colline de l’Hermitage transpercée par un tunnel ? Un vieux projet, bloqué une fois par un ministre communiste. Un aéroport sur le plateau de Pomerol ? Tiens, voilà une piste de Progrès.

Je comprends comment on peut devenir zadiste.