Un grand professionnel du vin, un homme d’influence.
Son métier ?
Régisseur. C’est lui qui apportait un chiffre d’affaire publicitaire au journal qu’il représentait, Le Figaro, l’obligeant ainsi à créer un environnement rédactionnel favorable. Il a été le premier à inventer la publicité du vin et les suppléments vin de la grande presse, c’est lui qui a sorti le vin des pages de la seule presse spécialisée. Après un début de carrière orienté gastronomie (Gault et Millau, Cuisine et vins de France), il crée en 1986 le Guide des routes du vin où il nomme Antoine Gerbelle à la rédaction en chef. Les grands noms du vin de l’époque s’y succèdent, Michel Smith, Christian Flacelière, Bernard Burtschy et un petit jeune qui fera la carrière qu’on sait, Thierry Desseauve.
En 1991, Daniel inaugure les pages Vin du Figaro qui durent toujours. C’est lui et lui seul qui a imposé le vin comme un sujet récurrent dans un grand groupe de presse national. Il commence avec Le Figaro Magazine, continue avec le quotidien. Contre vents et marées et, particulièrement, contre la sourde opposition d’une partie de la rédaction, il réussit à rendre hebdomadaire la page vin du quotidien. Une très jolie façon de donner de l’air à toute la filière, reprise en un chœur touchant par toute la presse française. Belle façon aussi de faire valoir la culture du vin, son caractère immuable, son origine si ancienne. Sa connaissance très exhaustive des arcanes du mondovino français lui vaut plus que jamais la confiance de tous les grands décideurs et lui permet ainsi d’asseoir son influence.
Après avoir traversé un épisode santé très difficile avec un courage et une opiniâtreté qui ont forcé l’admiration de tous, il était toujours le premier de son métier et c’est encore lui qui donnait au vin la médiatisation papier la plus importante et la plus régulière. Il a pesé très lourd, mais toujours avec légèreté, dans les décisions éditoriales et, donc, dans la place faite au vin et ce, malgré les visites régulières à l’hôpital et les périodes de faiblesse qui suivaient et que ce travailleur acharné supportait mal.
Il y a peu, il me disait, vibrant de fierté, qu’il avait gagné dix ans de vie, que c’était dix ans d’échec pour la maladie. Elle a gagné à la fin, comme souvent.
Pour qu’aucun doute ne subsiste, je dois à Daniel Benharros d’avoir intégré ce métier formidable. Il m’a toujours soutenu avec une fidélité sans faille, c’est un luxe et un confort. Je ne suis pas le seul. Un très grand nombre de ceux qui occupent aujourd’hui une position dans la presse du vin lui doivent entre beaucoup et énormément. Je sais que chacun, au fond de lui-même, est dévoré de tristesse. Ce sont les souvenirs de Daniel qui nous rendent le sourire et qui nous donnent, ce matin, la force de continuer. Tous ensemble, nous perdons un grand ami, un grand supporter. Nos prochaines rencontres sous le signe des grands vins et de la franche rigolade seront bien plombées par son absence.
Daniel Benharros |