« bon appétit » et ils agitaient la main pour dire merci. On riait très fort et on se faisait un peu engueuler par les parents.
L’impression d’être le neuneu qui déjeune au bord de la route m’est revenue en pleine figure cette semaine à l’occasion d'un déjeuner étouffant au bord de l’autoroute urbaine des bords de Seine entre l’Alma et le Trocadéro. Nous étions chez Monsieur Bleu, au Palais de Tokyo. Le maigre écran végétal empêche de voir les voitures, mais pas de les entendre, c’est assourdissant.
Il fait trop chaud, on est mal, on peut à peine se parler à cause du bruit du quai. Situation ridicule pour un déjeuner qui aurait du tenir ses promesses de félicité. Assiette d’une banalité affligeante. Service alerte et efficace, mais accueil nul (le top-model à la casse de deux mètres de haut qui te reçoit en te considérant avec dégoût, y avait longtemps qu’on me l’avait pas faite celle-là). Allez, sujet suivant.
2 Moi, je lis Decanter, excellent magazine spécialisé et anglais. Là, un classement des 50 importants du mondovino, ce qu’ils appellent la Power List. J’adore, ça fait très rapper, PowaList. Un bon quart de Français, dont le premier, Pierre Pringuet (Pernod-Ricard) et Rouzaud, Arnault, Castel, Rolland, Villaine, Casteja, Dubourdieu, d’autres, que du lourd ou du très lourd et… Mathieu Chadronnier, le DG de l’un des trois plus importants négociants bordelais, un jeune homme très brillant et très inconnu que j’avais eu l’occasion de rencontrer et d’écouter dire des choses intelligentes. Les Anglais, qui ont moins de complexes que nous, ont établi cette liste en se demandant qui sont les gens qui ont de l’influence sur le vin que nous buvons. Des œnologues, des propriétaires, des critiques, des marchands. Bien sûr.
3 Grand soir au château de Saran, en Champagne, qui suivait une dégustation dédiée à Dom Perignon. Avec Richard Geoffroy, l’emblématique chef de caves de Dom P et Benoît Gouez, son alter ego en charge de Moët & Chandon.
Une excellente occasion de :
- se souvenir que moët 2004 est un grand vin, un très beau champagne de haut niveau.
- découvrir dom-pérignon rosé 2003, un vin puissant, follement aromatique, très dense en couleurs (20% de vin rouge)
- plus généralement, et au fil des millésimes goûtés, en bouteille ou en magnum, réaliser que le champagne rosé est aussi un vin épatant, pas un produit de mode ou d’été.
- écouter Bettane, sa science du champagne, adapter Mallarmé : « Tels qu’en eux-mêmes, l’éternité les change » ou faire voler en éclats une idée reçue : « Les plus sublimes terroirs de pinot noir sont en Champagne, pas en Bourgogne. » À ce stade, il reparle de son pote Francis Égly, ses coteaux-champenois.
- d’entrer dans un débat compliqué sur les qualités de l’acidité des vins. « Pas un gage de vieillissement » assène Gouez. « Un graal champenois dont il faut savoir s’affranchir » annonce Geoffroy. Bettane, puis Desseauve confirment. Ça plane à 15 000. Geoffroy encore : « 96 était un monstre d’acidité, les 2/3 des vins sont déjà morts. 1959, année chaude, acidité basse, un vin au sommet aujourd’hui. Personne n’a jamais prouvé que l’acidité est un élément du vieillissement. »
- s’émouvoir de l’extrême finesse d’un dom-p rosé 82.
- passer à table avec une théorie de moët-et-chandon de tous âges, 2004 à 1962. Très impressionnant et une preuve éclatante de la capacité quasi-unique du champagne à vieillir en grande beauté.
- Se réveiller le matin dans la grande maison en se disant que les beaux vins, même bus sans vraiment de mesure, ne font jamais de mal et s'apercevoir que tout le monde est d'accord avec ça.
Dom Pérignon rosé est souvent sublime (M. Geoffroy nous avait proposé et commenté un remarquable 2000 à Toulouse et le 92 est sublime).
RépondreSupprimerIntéressant le commentaire du maître de chai sur 96.
J'ai des doutes sur l'évolution de certains champagnes 96 (mangés et paradoxalement vieillis par leur acidité, oxydatifs ?).
Idem sur Clos Ste-Hune 1996 goûté il y a peu avec Pierre et Jean Trimbach.
Côté chardonnay, goûter un château de Saran en sec tranquille des années 60/70 est une expérience intéressante.
Le château-de-saran en sec tranquille est un mythe dont parle avec des mines gourmandes ceux qui… Moi, non, jamais.
SupprimerLe blanc a disparu ... et il reste encore un peu de rouge, avec l'Ambonnay d'Egly par exemple, comme tu le rappelles.
RépondreSupprimerLe 1996, bu en 2001 puis 2008, est en effet très acide (mais il ne jura pas dans une horizontale de crus bourguignons du même millésime).
Ah c'était vous qui déjeuniez en bord de seine. Je suis passé en bateau et vous ai crié :"Bon appétit" !
RépondreSupprimerAh, c'est gentil. Mais j'avais compris "bande d'abrutis"…
Supprimer"excellent magazine spécialisé et anglais"
RépondreSupprimerTu travailles dans l'oxymore maintenant ?
fmauss
C'est pour éviter les confusions, François.
Supprimer"(le top-model à la casse de deux mètres de haut qui te reçoit en te considérant avec dégoût, y avait longtemps qu’on me l’avait pas faite celle-là)." Pourquoi "avec dégoût", Nicolas ? T'étais mal luné, mal fringué, mal rasé, mal accompagné ? Franchement, ça m'étonne ! Avec morgue, peut-être ?
RépondreSupprimerRien du tout, Jacques. J'étais très bien accompagné par une jeune fille longue, légère, émouvante. J'étais bien mis dans mon costume de lumière, rasé de frais pour n'écorcher aucune joue et d'une humeur de rose.
SupprimerMorgue, certainement, mais "dégoût" est le mot juste.
eh bien ! des invitations prestigieuses dans des lieux d'exception !! chapeau bas
RépondreSupprimerif it doesn't flow it doesn't go
SupprimerExactement…
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