Le blog de Nicolas de Rouyn

Bonjour.
Ceci est un blog dédié au vin et au monde du vin, qu'on appelle aussi le mondovino. Et à tout ce qui entoure le vin, les belles tables,
les beaux voyages, les tapes dans le dos et les oreilles tirées.
Cela posé, ce qu'on y lit est toujours de-bon-goût-jamais-vulgaire,
ce qui peut plaire à votre mère. Dites-le lui.
(Only dead fish swims in ze stream).
Les photos sont signées Mathieu Garçon, sauf mention. Pour qu'elles soient belles en grand, il suffit de cliquer dessus.
Au fait, il paraît que "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération".
Nicolas de Rouyn



mercredi 9 décembre 2009

Le Grand Maching

Deux jours de pur bonheur au Grand Tasting, le salon des bons vins organisé par Bettane & Desseauve. L’idée forte, c’est que l’accès est réservé à ceux qui figurent dans le Grand guide des vins de France, c’est-à-dire aux vins qui ont reçu une note minimum de 13 sur 20, ce qui est déjà beau, si l’on considère le niveau de sévérité des notes attribuées dans ce guide, sans complaisance ni amitiés mal comprises. Certains laissent penser que pour être dans le Guide, il faut être au Grand Tasting, c’est pile le contraire.
Trois cents exposants de toutes les régions viticoles de France et d’Italie, du Portugal, d’Espagne. Beaucoup d’émotions œnologiques. Au hasard, le Clos des Fées, Dalmeran, François d’Allaines, un rosette blanc (jamais entendu parler de cette micro-appellation, et pourtant…). De très belles master-class. Dont deux. La première mettait en perspective château-grillet et vega-sicilia, des vins aussi rares que miraculeux. La seconde déclinait des trésors, perrier-jouët 85, cos d’estournel 82, vieux-château-certan 89, un bourgogne 78 de chez Jadot, une folie de chez Zind-Humbrecht, yquem 49, noval nacional 94. Tous ces vins présentés par leurs auteurs (même si Pierre Lurton n’est pas l’auteur d’yquem 49, il n’était juste pas né). Il faut, une fois dans sa vie, entendre Jacques Lardière (Jadot) expliquer la vaporisation des molécules, c’est ébouriffant. Et puis, il y avait ce public de passionnés, dont les producteurs louaient la qualité, la culture, l’intérêt pour la viticulture et la vinification. Il y avait beaucoup de monde, une ambiance bon enfant, jamais de bousculades ou d’énervements. Il y a bien eu quelques jeunes gens (et de moins jeunes) légèrement ivres le samedi soir, mais bon, comment expliquer aux visiteurs du salon des bons vins qu’il faut boire avec modération ? C’est l’un des derniers refuges où personne ne vous dicte votre conduite, où personne ne cherche à vous culpabiliser, où l’on vous sert de très belles choses en vous demandant votre avis. On ne va pas perdre cette espèce de paradis.

mardi 24 novembre 2009

Il est bien, le maire de Barsac

Barsac, les amateurs connaissent. C'est un petit bourg voisin de Sauternes qui produit de grands liquoreux. Une toute petite appellation dont le vin-star est Château Climens, une merveille veillée comme le lait sur le feu par sa propriétaire, Bérénice Lurton, une jeune fille qui fait très bien. Ces jours-ci, les liquoreux font l'objet d'un certain nombre de critiques, toutes plus idiotes les unes que les autres. On a ainsi entendu ce pauvre Jean-François Piège (ex-étoilé Michelin) déclarer sur LCI (une chaîne du cable, personne ne l'aura vu) que "le sauternes ne va avec rien". Nous avons démontré le contraire dans le supplément Vins du Journal du Dimanche paru le 22 novembre. Voilà maintenant que les attaques viennent de la mairie même de Barsac, ce qui est pour le moins inattendu. Au lieu de s'occuper de ses rond-points comme tout maire qui se respecte, celui-là a décrèté constructible une belle parcelle de vignes pour y aménager (tenez-vous bien) une aire d'accueil pour les gens du voyage et une résidence troisième âge. Soit dit en passant, les seniors vont adorer le voisinage... Passons. C'est le drame de la décentralisation, il ne se passe pas de semaine sans qu'un élu local ne se signale à l'attention du plus grand nombre. Permis de construire à discrétion sans le moindre respect de la plus élémentaire justice, avalanche de rond-points inutiles, feux de signalisation anarchiques, préemptions de terrains sans vision budgétaire ou urbaniste, juste pour emmerder un opposant local, etc, etc. Le pouvoir rend fou, c'est clair. Celui de Barsac ne se rend pas compte qu'il va déclencher un tollé de protestations qui va lui coûter son fauteuil aux prochaines élections. Encore une belle carrière politique qui part en quenouille. C'est ballot.

(Retrouvez ce billet dans le supplément Vins du Monde Magazine, à paraître le 4 décembre avec Le Monde.)

P.S. : j'ai été particulièrement discret depuis juillet pour cause de grave mésentente avec mon blog. Un bug m'en interdisait l'accès depuis la mise en ligne du billet qui épinglait l'affiche sponsorisée par Renault. Bon, c'est fini, ça remarche, me revoilà.

lundi 27 juillet 2009

Renault pipeau


Cette affiche, aussi basique qu’idiote, est le premier prix d’un concours initié par Renault, fabricant d’autos qui n’ont jamais d’accident, sauf quand les conducteurs sont bourrés. Et le texte ci-dessous est la réaction de Michel Bettane, président de l’Association de la Presse Vin. Nous la reproduisons pour dire notre adhésion à son indignation.

"En tant que président de l'APV et surtout citoyen responsable je tiens à regretter profondément la communication actuelle très perverse de Renault . Passe de sponsoriser un concours comme
« Tes idées à l'affiche » mais faire paraître et afficher à ses frais une photo aussi réductrice que celle qui représente un serviteur en smoking et ganté de blanc (idéologie fantasmatique puérile mais compréhensible chez un ado de 14 ans) offrir sur un plateau un apéro de moins de 5 centilitres (et donc complètement correct dans le cadre de notre législation actuelle) en sous titrant «l'accident de Monsieur est servi» est un non sens éducatif. Il condamne inutilement une classe sociale, un art de vivre, et au lieu de faire comprendre la notion de responsabilité, qui, de toute façon, devrait conduire à considérer toute voiture, même une Renault, comme une cause croisée d'accident aussi importante que celle de l'apéro susdit, infantilise, condamne et calomnie. Je souhaite que tout citoyen un peu sensé réagisse en décidant par exemple de ne plus acheter de Renault pendant au moins dix ans ! "

C’est promis, Michel. Plus de Renault pendant au moins dix ans.

mercredi 15 juillet 2009

Vive le droit de bouchon

Le droit de bouchon, c’est le (petit) prix perçu par un restaurateur pour déboucher et vous servir la bouteille que vous avez apporté. Aux Etats-Unis, par exemple, c’est une pratique des plus courantes. Dans les plus grands restaurants de Vegas ou de Miami, pour un droit de bouchon de 20 à 30 dollars, vous pouvez apporter les bouteilles que vous avez envie de boire et personne n’y trouvera à redire. Parce que c’est normal. En France, à de très rares exceptions près (le mythique Lion d’Or à Arcins dans le Médoc), c’est impossible. Pourquoi ? Parce que les restaurateurs comptent sur le vin pour faire de la marge. Et quelle marge ! De trois à dix fois le prix d’achat, parfois plus. Un vrai hold-up. Ceux qui proposent le vin « à prix coûtant » sont très, très peu nombreux et, le plus souvent, ne durent pas. Le résultat est facile à lire sur les cartes des vins de la plupart des restaurants. On ne trouve plus de grandes appellations. Plus de bordeaux, plus de bourgogne, plus de champagne. Quelques côtes-du-rhône inconnus, des languedoc en pagaille, trop jeunes, raides comme des piquets, des beaujolais mal fichus, des vins de Loire et des vins étrangers, bien sûr. Installés à l’autre bout du spectre, les néo-bistrots diffusent les obligatoires morgons de Lapierre ou Foillard, les loires des époux Breton, et des vins nature trop souvent impossibles. Quelques établissements contournent l’affaire en proposant une bonne liste de vins au verre. Une abstinence forcée qui ne règle rien. Et surtout pas la facture, elle est pire encore dans son rapport prix/volume. Voilà une profession qui vient d'obtenir une baisse très sensible de la TVA. Il est temps qu'elle s'aligne sur les pratiques les plus modernes de son métier. Et les difficultés de gestion des restaurants ne sont pas notre problème, nous n’avons pas à participer.
Nous voulons boire les vins que nous aimons quand nous en avons envie et il se trouve que l'essentiel de ceux-ci ne sont à peu près jamais à la carte des restaurants. Nous ne voulons plus être l'otage de ces cartes. Si nous sommes toujours prêts à faire des découvertes, nous ne voulons pas qu’on nous les impose. Nous voulons aller au restaurant avec nos bouteilles puisque le restaurant n'assure pas comme il devrait. Nous sommes prêts à payer un droit de bouchon raisonnable. On commence quand ?

jeudi 9 juillet 2009

La table de chevet de Bizeul


Il y a mille raisons d’avoir de l’affection pour Hervé Bizeul. Son clos-des-fées, son intransigeance, son blog, son exil à Vingrau qui n’a rien à voir avec la tentation de Venise. Il y a aussi Walden (bien sûr, les branchés du vin, impénitents bloggueurs, m’objecteront que ce n’est pas une absolue nouveauté. Certes, mais personne n’en parle jamais). Ce vin est l’une de ses plus jolies inventions. Inquiets de voir les très vieilles vignes de l’appellation disparaître sans espoir de retour, il a convaincu quelques petits vignerons de se rassembler autour d’un concept qui porte le joli nom de Walden, inspiré du livre de Henri-David Thoreau (Walden ou la vie dans les bois), un vieil habitué de sa table de chevet. Ce qui différencie ce walden des autres vins de marque à forte valeur marketing ajoutée, c’est le sens que Bizeul y a insufflé et les valeurs qu’il y ajoute. Il s’agit là de perpétuer à la fois un métier et des cépages. Certains grenaches et carignans, sauvés par cette initiative et la passion que Bizeul leur porte, approchent le siècle d’âge. L’affaire a commencé petit à petit. Ils étaient trois en 2004, neuf aujourd’hui. Le vin est excellent, à boire sur le fruit, il vaut 6,40 euros la bouteille et ce serait une sottise de passer à côté. Ce passéiste de Bizeul a fait pareil avec une grande oliveraie dont il désespérait de voir les oliviers rejoindre les bords des piscines de la presqu’île de Saint-Tropez. Il est comme ça, Bizeul, une sainte horreur de voir les belles choses disparaître. Et l’huile d’olive, comme Walden, est très réussie. Pour son blog, ne ratez pas www.closdesfees.com/blog2.

vendredi 19 juin 2009

Grand A et petit a


Il est le fils de son père, tenace, précis, organisé. Et puis, il a son côté rentre-dedans, un physique à la Terminator, sa façon d’être sûr que rien ni personne ne peut lui résister. Je ne lâche jamais, dit-il. On s’en doutait déjà. De prime abord, Paul Aegerter surprend, il n’est pas dans le moule de la vinocratie bourguignonne. C’est une sorte d’hyper-actif qui s’est lancé dans le grand bain très tôt. A 20 ans, il crée sa première société, une histoire de voitures, de passion. Il est toujours très « bagnole » mais moins. À 23, il rejoint le vignoble et son père, la société devient Aegerter Jean-Luc & Paul, c’est écrit sur l’étiquette. Grand A et petit a. À Jean-Luc, le savoir-faire, les vins, leur élaboration, la garde des traditions. À Paul, le commerce, l’innovation nécessaire, les gammes qui parlent aux gens. Les slogans sur les étiquettes, il fallait oser, mais ça marche. Paul croit à des choses simples, « même si on n’est pas connu, il suffit de parler aux gens et, si vous ne faites pas le malin, on vous fait confiance ». Une façon toute personnelle de mettre le pied dans la porte, servie par des produits adaptés et par les belles boutiques Aegerter de Beaune et de Nuits qui portent bien l’image. Le résultat se mesure aisément, le chiffre d’affaires multiplié par trois en sept ans. Pour être sûr de convaincre, il ajoute : « je ne me laisse jamais marcher sur les pieds ». Un côté Smith, Wesson and me totalement attendrissant.

La photo : Paul Aegerter photographié dans son chai par Mathieu Garçon

vendredi 5 juin 2009

Pomerol.com

Tapez cette adresse et, surprise, vous ne tombez pas sur le site de l’appellation mais sur celui de Monsieur Pierre Choukroun, propriétaire de 0,28 hectare à Pomerol et producteur de la-fleur-de-plince, en AOC pomerol. Voici ce qu’on peut y lire : « Le vin du Château La Fleur de Plince AOC Pomerol est un vin puissant, raffiné et rempli d'élégance. C'est un vin charnu, aux arômes caractéristiques de truffe. Ces vins peuvent se boire jeunes et vieillissent également fort bien ». Je vous laisse le soin de comparer ce descriptif à vos dernières impressions de dégustation d’un bon pomerol. Ce monsieur a fait main basse sur le nom de domaine (c’est comme ça qu’on appelle les noms de sites internet) parce que ce nom était libre, ce qui signifie que pas un seul des grands propriétaires de l’appellation n’y avait songé avant lui et que le voilà, pour les amateurs mal informés du monde entier, représentant unique des plus beaux vins du monde. J’ai fouillé partout, je n’ai trouvé aucune trace de ce vin, ni sur les sites marchands, ni dans les guides, ni au catalogue des quelques cavistes qui comptent encore.
Toi, Hubert et toi, Catherine, et tous vos pairs, et ces vieilles familles, les Nicolas, les Thienpont, les Berrouet, les Bailliencourt et les autres, cette aristocratie du grand vin, tous roulés dans la farine par le dernier arrivé. Si ce n’était pas aussi consternant, ce serait très drôle, ce côté "bien fait pour eux". Le site a été ouvert à la fin des années 90. Que faut-il en déduire ? Que tous ces grands noms du vignoble ne croyaient pas à internet, à l’époque ? Qu’ils n’ont jamais songé à mandater leur syndicat pour défendre l’appellation ni fait le nécessaire pour se donner tous les moyens d’en assurer la promotion ? Que tout le monde s’en fout ? On ne peut rien exclure. Certes, il y a un site pour le syndicat des vins de Pomerol, mais ce n’est pas pomerol.com, c’est vins-pomerol.com. Ce n’est pas pareil, pas aussi simple, pas aussi vite.
Aujourd’hui, ce qui agite les tenants de l’appellation, c’est d'imposer l’obligation de vinifier sur des chais construits sur le territoire de l’appellation, une nouvelle idée pour emmerder les petits producteurs qui vinifient dans les villages alentour. Certes, c’est une règle des AOC dont on comprend bien le motif, mais elle n’était pas appliquée à Pomerol en raison de la très petite taille de la majorité des propriétés. Il y a des jours comme ça où une grosse fatigue me gagne. Je vais chausser mes boules Quiès, ça m’évitera d’entendre ricaner les producteurs de vins italiens, espagnols, portugais, etc.

mercredi 27 mai 2009

Hausse des températures

2009, belle année avec des saisons comme avant. Le bonheur de vivre dans un pays tempéré. Nous, les amateurs de vins fins-bénis-divins, voyons avec volupté la saison des grands machins céder le pas à celle, plus facile, des petites bouteilles. Pas forcément très petites, d’ailleurs. Nous commençons à sortir de cave les rosés entreposés l’an dernier, les 2007, et à rentrer les 2008. Cette seule année d’attente est la garantie de boire ces rosés à leur meilleur. Oui, tout s’attend, dont le plaisir. Laisser tranquilles nos grands champagnes complexes et vineux et se pencher sur les non dosés légers et vifs, les blancs de blancs aériens, les rosés roses. Réfléchir à quels rouges avec la salade, avec les grillades. Et les blancs, cette suavité florale qui va si bien avec les chaleurs. C’est l’été et ses soirs qui traînent en douceur, pas question de rater ça d’une seule bouteille. Faire bien réclame un peu de concentration, ici comme ailleurs. Et le plaisir est un labeur de tous les instants.
Les champagnes.
Le D de Veuve Devaux, dans sa version Ultra (non dosée), le rosé de Piper-Heidsieck, tout facile, les filles adorent. Le blanc de blancs de Billecart-Salmon, léger comme une aurore boréale..
Les rosés.
Bien sûr, tous les bandols, les princes du rosé. Une petite préférence pour ceux de La Bégude et de Pibarnon, qui vieillissent si bien. Aussi, le rosé de Orenga de Gaffory, un vin corse parfait au bout d’un an (ce n’est pas souvent qu’on peut parler en bien d’un truc corse, à part le vin et le jambon).
Les rouges.
Des cairannes de cinq ans (2003), à 16°C. Chez Richaud ou le Domaine de la Présidente. Des touraines 2006 de chez Marionnet (qui d’autre ?). Le château-moulin du Château Moulin Pey-Labrie, un canon-fronsac 2005. Tout ceci autour de 10 euros et moins.
Les blancs.
Les jolis sauternes secs de Doisy-Daene, Malle et quelques autres (S de Suduiraut, par exemple). Les fieuzal, smith-haut-lafitte, domaine-de-chevalier. Les petits bourgognes comme un montagny ou un hautes-côtes-de-beaune. Certains provences comme le sainte-roseline, très réussi.
Et des verres de bonne qualité (forme, matière, …) pour ne rien perdre des affolements olfactifs. Les Riedel sont parfaits, mais ce ne sont pas les seuls.

mardi 19 mai 2009

Les sommeliers deviennent-ils fous ? (2)


Là, nous sommes à 123 mètres d'altitude. L'horizon parisien, vu d'ici, est étonnant. Le point de vue vaut la visite, même si le restaurant, non. Nous sommes huit ou dix à table, nous goûtons des vins argentins cultivés haut sur les pentes de la Cordillère des Andes, d'où l'invitation, haut dans le ciel de Paris, tu mords le concept ? Le soleil se couche dans mon œil, une averse nettoie les carreaux. Le premier vin est bouchonné. Emotion autour de la table. Pas grave, de toute façon, le sommelier n'a même pas mis son nez dans la bouteille. Le quoi ? Le serveur en charge de la sommellerie, d'accord. Il change les verres en faisant la gueule, comme si c'était lui qui faisait la plonge (peut-être, après tout). Deuxième bouteille impeccable. La conversation va bon train ("alors, vous irriguez, en Argentine ?", ce genre de gracieusetés). Profitant de ce qu'on ne le regardait pas, le sommelier remet les verres à niveau avec une troisième bouteille bouchonnée. Re-émotion, viens-là toi, l'autre se rebiffe, renifle un verre d'une moue dégoûtée, le cirque continue. Il faut insister. Ce type a un patron, une icône de la cuisine mondiale et un chef, célèbre dans le mondovino. A l'évidence, ni Alain, ni Gérard ne se préoccuppent de former les jeunes gens employés dans ce sommet de l'art urbain de la fin du XIXe siècle. C'est bien dommage, on n'y reviendra pas.

Ils ne sont pas les seuls. Ici, trois autres aventures avec des sommeliers impossibles.

jeudi 7 mai 2009

La terre est basse, même en Provence


Trois jours magiques entre les vignes et les oliviers. Aller voir comment ça se passe dans les vignobles de Provence. Rassurez-vous, amis lecteurs, tout va bien. Vignelaure, Sainte-Roseline, Roubine, les Demoiselles, Ollières, Dalmeran, Ferry Lacombe, Mentone. Les trois premiers sont nettement devant, les autres pas trop loin derrière. Ces endroits sont des acquisitions récentes de milliardaires passionnés. Souvent, on se dit que ces gens s’achètent une étiquette pour le prix d’une maison. Que la taille de la piscine a plus d’importance que celle du vignoble qui l’entoure. On se prend à croire que l'allée des grands platanes est mieux entretenue que les parcelles de grenache. Il y a même un agent immobilier qui a inventé l’expression ultra-méprisante de
« potager viticole » pour désigner le genre de vignoble qu’il vend, les motivations supposées de ses clients. Il n’a jamais compris comme il se trompe. Presque tous ceux qui ont mené leurs investissements de cette manière s’y sont brûlé les ailes et la Visa Platinum. Ils sont partis se faire voir ailleurs avec leurs illusions et leurs caprices. A un moment donné, on ne rigole pas avec la terre qui, rappelons-le, est basse. Ceux qui restent veulent très fort s’y pencher. A des degrés divers, bien sûr, mais tous ont été piqués par leurs vignobles. Ils ont les yeux qui brillent quand ils parlent, c’est sympa. Ils déclarent tous les plus grandes ambitions pour leurs vins. Ils ne parviendront pas tous au sommet, terroir oblige. Mais quelle débauche de moyens, quelle gourmandise dans l’investissement. Ils ont tous des efforts à fournir et, le plus souvent, vers plus de propreté dans la culture de la vigne, moins de tracteurs, moins de pesticides, insecticides, etc. Au moins, ils le savent, confusément peut-être, mais ils sentent bien qu’une partie des propos de leurs conseillers n’est que pur pipeau, bien loin de l’excellence pinardière qu’ils appellent de leurs vœux. Ils savent que les amateurs de vin se posent des questions, dans le monde entier, les posent à leurs cavistes qui les posent aux grossistes qui les posent aux importateurs qui exigent des réponses et qui, demain, imposeront des normes. Demain, les gars, pas après-demain. Il y a urgence à bien faire. Mais le mondovino que nous fréquentons, celui que nous défendons, a ceci de bien qu’il ne barguigne pas avec la qualité. Tous ces gens, on dit aussi néo-vignerons, viennent du monde des affaires, ce ne sont pas des perdreaux de l’année. Ils savent comment on construit une réussite et si, parfois, ils ont pu amasser quelques millions sur de coupables entourloupes (toi là-bas, ne dis pas le contraire), leur présence dans le vignoble est souvent vécue comme une sorte de rédemption. C’est leur chemin de Damas. En 4x4 intérieur cuir, certes, mais quand même. Bien sûr, ils sont souvent très débutants, mais ils apprennent vite. En Provence, ils regardent comment procèdent leurs homologues bordelais, ces autres milliardaires qui s’amusent beaucoup à faire le mieux possible, un œil sur le Parker, l’autre sur le Bettane & Desseauve. Ils savent déjà qu’ils auront plus de mal à parvenir à la notoriété, c’est-à-dire à la rentabilité, mais déjà ils sont touchés par la langueur provençale alors ce n’est pas si grave. Et, au moment de revendre le vignoble, il n’y a pas photo entre Saint-Rémy-de-Provence et Pauillac. Là, je compare des villégiatures, pas des notes de dégustation…

La photo : Les parcelles de vigne du Château Dalmeran, au cœur des Alpilles, photographiées à Saint-Etienne-du-Grès par Mathieu Garçon

lundi 20 avril 2009

Les sommeliers deviennent-ils fous ?

Un vent de folie s’installe sur ce joli métier. Trois évènements auxquels j’ai assisté, consterné. Dans un grand restaurant avec vue de l’avenue Montaigne à Paris, d’abord. Invités par la famille Aubert (Château La Couspaude), nous étions quelques-uns autour d’une belle table bien blanche. Le sommelier sert un beau millésime. Hélas, la bouteille est bouchonnée. Deux d’entre nous attirent l’attention du sommelier pour lui demander de changer la bouteille. Moue ricaneuse du préposé, limite méprisant, qui agrippe brutalement un verre et commence à ergoter. Pas de chance pour lui, les deux qui demandaient de changer la bouteille étaient Olivier Poels (Revue du vin de France) et Thierry Desseauve, deux des cinq meilleurs dégustateurs français.
Une autre fois, il y a quelques semaines, dans la campagne charentaise. Nous y sommes pour tester l’offre oeno-touristique d’une grande maison de Cognac. Le déjeuner est assuré par un traiteur. Là encore, vin bouchonné, un château-brown. Là encore, l’imbécile rigole et déclare que c’est ce vin qui est « comme ça ». J’imagine la tête de Jean-Christophe Mau, propriétaire de ce cru, si je lui racontais ça ! Je m’inscris en faux, gentiment. L’imbécile insiste, mais s’incline, bien obligé (le client est roi). La seconde bouteille est parfaite et je lui propose de goûter pour son édification et qu’il cesse de colporter des informations désobligeantes. Il goûte et persiste. J’abandonne, frappé de lassitude.
Troisième aventure dans un grand hôtel, spa, etc du Bordelais, au milieu des vignes du château dont dépend cet hôtel. D’abord, en plein dans les Graves, pas une bouteille de bordeaux à un prix décent. J’ai une pensée pour le touriste étranger qui doit se poser certaines questions. Surtout quand il voit la production du château facturée plus de trois fois le prix caviste alors qu’elle sort d’un chai qu’on voit très bien depuis la table du restaurant. Mais revenons à nos bouchons. Je choisis un petit vin italien, en provenance de La Spinetta, un beau domaine du Piémont qui appartient à l’excellent Giorgio Rivetti, un authentique passionné. Je sais où je vais. Le sommelier en fait trois tonnes, hume le bouchon et sert avec mille salamalecs un vin… bouchonné. Là, je m’insurge. Vous le saviez, dis-je. Oui, mais ça dépend des clients, me retourne-t-il, tranquille comme Baptiste. Des manières totalement honteuses. Bientôt, on n’osera plus dire qu’un vin est bouchonné. En plus, ces grossiers personnages laissent penser que c’est peu ou prou la faute du vin alors que nous savons tous que ce n’est la faute de personne, sauf, peut-être, celle du marchand de bouchons. Nous, qui avons l’habitude et le savoir-boire en matière de vins, nous nous en sortons encore mais avec de telles pratiques, je n’ose pas penser aux milliers de consommateurs maltraités par ces crétins à la courte vue. Ils accroissent la défiance du public à l’égard du vin, ils augmentent encore ce sentiment largement partagé que le vin est l’affaire des spécialistes, ils découragent leurs clients. Et ils sont très simplement en train de scier la branche sur laquelle ils ont installé leur carrière.

Une autre histoire de sommeliers impossibles, ici

mardi 24 mars 2009

Le temps s’est arrêté à la Grande Jatte

Les hasards de l’existence (aller chercher un scooter à la fourrière de Nanterre, la plus introuvable du monde…) nous ont menés à notre premier déjeuner en terrasse de la saison. La Guinguette dans l’île de la Jatte (ou de la Grande Jatte). Pour avoir bossé cinq ans dans un immeuble acier-verre de cette île de pub, à une époque où les salaires étaient considérables et les loisirs aussi, nous avons fréquenté la Guinguette vraiment souvent. C’était la deuxième moitié des années 80 et nous n’y étions jamais retournés. Etrangement, si l’immobilier local a beaucoup changé - plein de petites maisons de luxe au lieu des terrains vagues, des réparateurs auto, des chiffonniers en tous genres, les restos sont les mêmes. Même Café de la Jatte et son inamovible patron avec super-sympa qui clignote sur le front, même Guinguette et ses gentilles attentions approximatives, même Petit Poucet et sa clientèle en sur-régime, même Pieds dans l’eau, doucement largués. Le seul truc vraiment nouveau, c’est la sonnerie des portables en wild. Cette sensation que rien ne change est très rare à Paris où tout bouge et se transforme, surtout les restaurants. Pas vraiment sûr que ce soit agréable, plutôt une sorte de trouble. La serveuse a 20 ans, mais on a envie de lui dire « vous me reconnaissez ? », comme dans la pub. Forcément, elle va prendre ça pour du harcélement et on n’aura jamais le temps de s’expliquer avant l’arrivée des flics. Alors, bon. Les yeux dans les frondaisons encore dégarnies des grands arbres, le nez à l’écoute des remugles de ce bras de Seine, l’oreille dans l’absence de pots d’échappement, un samedi de premier soleil, c’est pas mal, la Grande Jatte. Au menu, c’est la carte parisienne de base, pas l’ombre d’une surprise même mauvaise. Alors, va pour le tartare aller-retour et son verre de grosses frites maison (des frites dans un verre, j’te jure). Et le cabillaud au ras du pas assez cuit donc parfait, nacré, nerveux presque, avec la purée de pommes de terre de quand j’étais petit. Tout ça dans une rusticité de demi-teinte. Pas de coup de klaxon, mais pas de moquerie non plus. Ici, comme partout, le café est baptisé gourmand. Un café et quatre petites pâtisseries, le dessert est compris dans la question, on a l’impression de faire maigre et c’est bon. Oui, le café aussi. Le mini-financier est chaud et croustillant, le sablé épais comme une feuille s’accorde parfaitement au café et le macaron à la framboise va très bien à la dernière gorgée du vin. Le vin, justement. Ici, on fait pas dans le militantisme nature. Pour faire plaisir à ses clients, le préposé de la Guinguette aligne une variété de seconds vins des grands crus classés. Connétable de Talbot, Esprit de Chevalier, celui d’Issan, d’autres encore dans un embarras du choix assez surprenant. Plus ou moins 40 euros le col ou au verre. Ou encore dans un format intermédiaire, c’est ce que vous voulez. La Guinguette a toujours été à l’écoute de ses clients. Et la serveuse ? Elle ne nous a pas reconnu mais elle fait très bien dans une interprétation perso-bien jouée du ni trop, ni trop peu. Faut-il y aller même si mon scoot n’est pas à la fourrière et si on n’a pas grandi sur les genoux du patron ? Oui, sans doute. Pour le prix (moins de 100 euros à deux), il y a bien pire.

vendredi 20 mars 2009

Quelques minutes de pur bonheur


Au rang de nos préoccupations de chaque jour, les vins qu’on goûte. Il y a les grands, cette habitude divine, facile et presque toujours épatante. Et les autres, les plus difficiles à trouver, ceux vers lesquels on s’aventure avec plus de réticence, de doute. Cet inconnu qui fait frissonner. Et si c’était pas bon, je me demande, j’hésite, tout ça. Ainsi du grand-ormeau, un lalande-de-pomerol 2003. Un vin de maturité, l’été 2003, la vigne recuite sous le cagnard. Bien construit, durable (à garder), un très beau nez complexe dominé par le grillé, le cacao, une bouche magnifique. La bouteille est déjà finie, tout le monde est ravi. Je ne me souviens plus du prix, c’est pas bien cher en soi et pas cher du tout par comparaison avec certains pomerols autrement chic et bien moins intéressants. Une autre ? Un chenin du Domaine FL, agglomérat des Domaines de Jo Pithon et Chamboureau Il s’agit d’un anjou blanc 2007, 100% chenin, de petit rendement (25 hl/ha). Un nez de pêches et d’agrumes, une acidité arrondie et peu agressive, pas le côté perforant de certains chenins, mais quand même une belle droiture. On lui sent un potentiel de quelques années. Pour 12 euros, c’est parfait. Et, comme souvent, il est encore meilleur le lendemain, 24 heures après l’ouverture. Pour info, ce domaine nouveau est entièrement cultivé en agriculture biologique et conseillé par Stéphane Derenoncourt. Il y a de l’intention et du savoir-faire. Des gens qui vont vers le mieux, une fois de plus. Cet acharnement à travailler bien, à faire propre, c’est le vin français qu’on aime, si loin des mauvaises habitudes d’autrefois. A suivre.

mardi 24 février 2009

L'ennemie du vice



Pendant qu'une bande de zozos s'échine à taper à coups redoublés sur la tête du vignoble français, les bonnes idées fusent de partout. Celles du jour viennent de chez Ayala, maison de Champagne de bonne notoriété et propriété depuis peu de Bollinger, ce qui ajoute de la réputation à la notoriété. Et de la maison Dom Pérignon, qu'on ne présente plus. Ce sont des idées assez voisines, mais pas les mêmes. Dans un coffret, qualifié "d'élégant", Ayala a mis deux bouteilles. L'un, le Brut Majeur, est dosé à 8 grammes de sucre par litre et l'autre, le Zéro dosage, est le même vin, issu du même lot (ou stock), dégorgé à la même date mais sans apport de sucre (ou liqueur de dosage). Ce qui permet d'étalonner son propre goût pour les champagnes sans sucre ajouté en soumettant ces deux vins à une dégustation horizontale (vous n'êtes pas obligé de boire couché ; horizontale veut dire deux vins de la même date, par opposition à verticale qui désigne une dégustation de deux ou plusieurs vins de millésimes différents). C'est une bonne idée parce qu'elle est pédagogique et que, ce faisant, elle propulse l'amateur vers la connaissance qui, comme chacun sait, est l'ennemie du vice. Ces deux vins presque identiques sont issus en majorité de la récolte 2005 avec une part de 2004 et de vins de réserve (millésimes antérieurs). Ne les ayant pas goûté encore, recopions le dossier de presse : "Le Brut Majeur Ayala s’apprécie à chaque moment de la journée. Avant mais également tout au long d’un repas. Il accompagne ainsi parfaitement les langoustes, homards, poissons crus ou grillés. Les sushi et la cuisine asiatique lui conviennent également. Les viandes blanches ne sont pas en reste ainsi que certains fromages à pâte molle et croûte fleurie, boursault, coulommiers, chaource, brie, brillat-savarin. Quant aux desserts, il met en valeur les desserts à base de fruits, pommes, poires, pêches… Le Zéro dosage se marie parfaitement avec les crustacés, fruits de mer, coquilles st-jacques, poissons crus et sushis. Le caviar est également recommandé." Ben tiens. Ce qu'il ressort de cette belle prose est que l'un (le Zéro dosage) est plus vif, plus tranchant et l'autre, plutôt plus rond pour ne surtout pas dire plus doux. Le coffret avec les deux bouteilles coûte 70 euros et on le trouvera sûrement chez Lavinia. Faites le test, il ne peut être que passionnant et, au moins, vous saurez ce que vous aimez et de quoi vous parlez. Déjà, c'est énorme. Chez Dom Pérignon, la démonstration est naturellement beaucoup plus raffinée et onze fois plus chère. Richard Geoffroy, le chef de caves inspiré de la maison, présente ensemble le Dom P 1995 dit de "première sortie" et le Dom P Œnothèque du même millésime. Pourquoi ? Le premier a été dégorgé en 2002 après 7 ans de cave, le second a été dégorgé en 2006 après 11 ans de cave et deux années de plus avant sa mise sur le marché. La différence entre les deux est donc la conservation en cave mais pas seulement. Le second, l'Œnothèque 1995, est moins dosé que le premier. Moins de sucre dans la liqueur de dégorgement. Une différence de quatre grammes par litre et on la sent très bien. Si le premier développe des arômes dits secondaires, assez miellés, le second est plus vibrant, plus jeune si l'on peut dire. Bon, c'est vrai que ce sont des plaisirs de grand amateur du champagne - et des plaisirs coûteux, mais c'est une dimension du champagne vraiment intéressante. Le coffret "Side by side" de Dom Pérignon 1995 est en vente chez les grands cavistes à 790 euros. Pas plus cher qu'un petit sac d'entrée de gamme chez Prada, au fond. Ainsi va le luxe, on n'est pas obligé de tomber dans tous les panneaux à la fois.

lundi 23 février 2009

Les gros malins

En plein débat à l’Assemblée nationale sur la loi Bachelot dite loi HPST, voilà que l’Institut national du cancer nous annonce que le vin favorise le cancer. Comme ça tombe bien, quel heureux hasard du calendrier. Ah ! Les gros malins. Dans la foulée, toute la presse relaie la (dés)information comme un seul homme. Pourtant, il y a des raisons de douter, mais pas un journaliste n’a émis la moindre hypothèse contraire. Je ne vous fais pas mon compliment, les gars. En plus, je ne comprend pas. Ces journalistes ne boivent que de l’eau ? Ils détestent le vin, la viticulture, les bonnes bouffes entre potes, la France, ses traditions, sa culture ? Il est où le problème ? Qu’ont-ils à gagner à reprendre de tels nanards ? Est-ce la force de l’habitude, comme disait le juge de Montgolfier à Tapie Bernard à propos de ses errements dans l’affaire OM-VA ? Et d’ailleurs que disent les autorités sanitaires françaises et européennes à ce sujet ? Ça, au moins, c’est facile à vérifier. Elles disent la modération, pas l’abstinence. La modération, il y a longtemps que nous en savons la valeur, vous et moi. Il y a plusieurs siècles que nous ne nous sommes pas saoulés, exercice impossible réservé à des gens que nous ne fréquentons bien sûr plus, les (trop) jeunes. Les organisations internationales les plus sérieuses comme le WRCF, fond mondial de recherche contre le cancer, se garde bien de tout amalgame. Prudent, cet organisme n’exclut rien mais reconnaît que le risque lié au vin est bien moindre que celui attaché aux autres alcools.
Pour contrer ce genre d’effet d’annonce, on peut aussi se contenter de réfléchir. Si le vin est cause de cancer, pourquoi la consommation de vin a-t-elle baissée de moitié quand le nombre de cancers a plus que doublé, le tout sur le demi-siècle écoulé ? Et puisque les lobbies hygiénistes avancent sous prétexte de défendre leur petit commerce, la jeunesse en péril, pourquoi attaquent-ils avec autant de virulence le vin français, lors même que toutes les études de consommation montrent que le vin n’entre que pour 5% dans la consommation d’alcool des 15 - 24 ans et 12 % dans la tranche 25 - 34 ans ? Ces lobbies, quelles sont leurs véritables motivations ? Pour qui travaillent-ils ? A qui profite le crime ? Même la Cour des comptes et son président, Philippe Séguin, se posent la question. Amis journalistes, please, faites-en autant. Au moins…

mardi 17 février 2009

Le poème de François V.


C’est une histoire de la vallée du Rhône, le nord de la vallée. François Villard fait partie des grands vignerons de ce quartier. Il y en a d’autres, tous attentifs à faire le mieux. Pour aller vite, disons Chave, Colombo, Guigal, Chapoutier, Belle (voir ci-dessous), Combier, Jaboulet, Courbis, etc., ce n’est pas un classement, ils sont nombreux, j’en oublie bêtement. Lui, le Villard, il s’est entendu avec deux autres gros calibres (Cuilleron et Gaillard) pour créer les Vins de Vienne, cette idée de faire revivre des coteaux abandonnés à Seyssuel (oui, riez). Je ne l’ai jamais encore rencontré et je ne sais pas tout de cette histoire de Vins de Vienne mais, quand même, on voit bien les motivations. Bien sûr, chacun des trois continue d’exploiter son propre domaine et à produire sous son propre nom.
François Villard est un poète et, comme il ne connaît pas d’éditeur de poèmes, il a mis l’un des siens sur l’étiquette de son saint-joseph « Reflet » 2003 fabuleux, concentré, mûr, gras, une merveille bue trop tôt comme d'hab. D’accord, François Villard, c’est pas François Villon, il dit les choses à la louche et en grosses lettres sur l’étiquette de son vin, chacun son media. Vous voyez, la lutte continue et, ouf, elle est partout. Elle ne s’arrête jamais, en fait. Il faut toujours se bagarrer pour défendre des évidences. Et s’agissant du vin, on a l’impression de se battre contre un occupant qui voudrait nier les réalités culturelles de la France, ses goûts, ses racines, son histoire, tout ce qui est à nous et qu’on aime. C’est éprouvant. Villard et plein de producteurs, presque tous les journalistes emmenés par Bettane, Desseauve et Burtschy et l’Association de la presse du vin, vous, moi, tous, nous sommes comparables à ces résistants d’une époque qu’on croyait révolue. Nous, les bons vivants, les joyeux, gens de goûts et de plaisirs, nous voilà contraints de remonter au créneau de la militance. Ça aussi, on l’avait oublié. On n’en avait plus envie. Nous voulions rester peinards avec nos grandes bouteilles, nos verres à pied et nos potes, nos belles amies, nos truffes du Tricastin, sans embêter personne, même pas nos voisins.
Non. Pas possible. Voilà l’imbécilité et ses alibis tout faits qui viennent nous casser la planète. Un coup, c’est le logo « femme enceinte » qui salope les belles étiquettes et, la fois d’après, voilà qu’ils veulent interdire les dégustations publiques. Demain, si nous n’y prenons garde, il va falloir écrire « boire tue » sur la bouteille. Ces gens, ce sont les dirigeants des associations anti-alcooliques, ce que nous appelons les lobbies hygiénistes. Des ayatollahs avec des moyens considérables (200 millions d’euros par an !) ponctionnés sur les fonds du Ministère de la Santé et au nom de la santé publique, justement. Avec tout cet argent, ils payent des avocats pour faire des procès à tel quotidien coupable d’avoir publié un article sur le champagne, ils imposent des réglementations grotesques qui font mourir de rire les viticulteurs étrangers ravis de l’aubaine, ils mènent des « études » douteuses et tordues et ils tirent des conclusions qu’ils nous imposent à tous alors que nous n’avons rien demandé. C’est tout ? Oui, c’est tout. Vous trouvez que 200 millions pour ça, c’est cher. Oui, moi aussi. Vous avez envie de crier « rendez l’argent », moi aussi. Avec la crise, 200 millions, ça pourrait soulager un tas de gens. Pas seulement les avocats des associations. Les gros malins font un vaste amalgame entre le tabac, la vodka, l’héroïne, le vin, tout pareil. La main sur le cœur, avec des photos de petits enfants en sautoir pour amadouer la ménagère de moins de cinquante ans et le prétexte de la lutte contre l’alcoolisme en étendard, ils profitent grassement d’un système totalement dépassé. Trop de trucs à faire, on délègue. Trois sommités médicales en rupture de clientèle ou à la retraite depuis longtemps, la loi de 1901 en bandoulière, deux ou trois bonnes intentions affichées et hop, vous prendrez bien quelques millions d’euros pour lutter contre la viticulture française et promouvoir la pharmacopée anxiolityque ? Ils prennent. Ces gens sont des fauteurs de trouble, ils luttent contre la paix sociale, même pas foutus d'être efficaces contre le binge-drinking des ados. 200 millions. Par an. Ce sont eux, les ennemis de l’intérieur. Au secours, l’anti-France est de retour !

PS : si certains de mes lecteurs s’émeuvent de l’emploi du phonème « anti-France », je les renvoie aux définitions qu’en donne Wikipedia via Google. Pour les plus âgés d’entre vous, relire Gotlib et son Superdupont.

mercredi 11 février 2009

Belle au Miroir

Le quartier, c’est les Abbesses. Boboland par excellence, je sais, j’y habite. S’il y reste encore quelques commerces de bouche, les marchands d’habits prennent une place folle, on se croirait dans un air de Souchon. L’avantage du voisinage, c’est que le bobo, il faut le nourrir et pas n’importe comment. D’où, depuis quelques saisons, floraison de néo-bistrots, tous plus épatants les uns que les autres. Le pionnier, c’est la Famille, rue des Trois-Frères. Il a été suivi par le Café Burq, rue du même nom. Depuis peu, le buzz local vous expédie au Restaurant Miroir, en haut de la rue des Martyrs. En salle, une jolie fille sympa déjà croisée chez Lavinia, une bonne maison. Mais ici, elle est chez elle. Son mari sort de la cave de la Tour d’Argent où il était second de l’icône de la sommelerie, l’excellent David Ridgway et ses 450 000 bouteilles pour 14 000 références (!). Le pauvre, il en a bougé des caisses de douze… Et le chef arrive des Lyonnais, un bistrot Ducasse près de l’Opéra-Comique.
Pour commencer, une très raffinée crème coquillages et crustacés (Brigiiiitte, reviens) puis une belle entrecôte cuite à la perfection et accompagnée de la plus belle des purées du monde. Le genre d’endroit où emmener votre mère histoire de la culpabiliser un bon coup, en mémoire des purées impossibles qu’elle vous a fait ingurgiter quand vous étiez enfant. On les mangeait, mais on mangeait aussi ses infâmes coquillettes, ses artichauts et toute la litanie des plats d’enfants, ceux qui sont bons pour la santé, une horreur. Revenons au Miroir. Evidemment, la carte des vins est parfaite, le choix difficile. Les prix, sans faire de cadeaux, se tiennent à leur coefficient multiplicateur raisonnable. Un champagne blanc de blancs de chez Gimonnet à 42 euros, les petits bourgognes rouge et blanc de chez Bouzereau à 23 euros, l’inévitable morgon nature de Marcel Lapierre à 33 euros et, surprise, un cheval-blanc 89 à 1 000 euros. « J’en ai déjà vendu un », se vante le sommelier. Comme quoi, il suffit d'oser… La carte des vins compte déjà une cinquantaine de références, toutes finement choisies, bravo.
Nous, nous avons préféré un crozes-hermitage, cuvée Louis Belle 2005 à 35 euros. La Maison Belle, à Larnage, au nord de Tain, est injustement méconnue. Dirigée par Philippe Belle, elle produit sept cuvées différentes en crozes, saint-joseph et hermitage, en rouge et en blanc. Celui que nous avons dégusté au Miroir était parfaitement à sa place, dans le millésime, un peu en retrait, il lui faudra trois à cinq ans pour tout donner, mais allez expliquer ça à un restaurateur qui n’a pas les moyens de financer un stock. En attendant que les vins vieillissent, n’hésitez pas à venir au Miroir, l’assiette et le verre méritent votre clientèle exigeante. Et on s'y verra.

lundi 9 février 2009

Méo & Alleno


Pour déjeuner au Dali, il faut de l'abnégation et pardonner la touche d’ail dans le hamburger, nette faute de goût quand on nourrit des gens qui dégustent des vins fins (vrai sabotage, en fait). Passer sur les ravioles aux langoustines, caoutchouteuses. Et oublier que les canapés trop profonds et les tables trop basses n’arrangent rien. En plus, la personne assise en face de vous sur un fauteuil culmine trente centimètres plus haut, c’est bizarre, on ne voit pas bien l'intention. Les décorateurs ne sont pas souvent les amis des bons vivants. Nous étions chez Alleno pour goûter quatre des vins de Méo-Camuzet, belle marque de Bourgogne, en compagnie de Jean-Nicolas Méo, jeune type affable et plutôt sympathique. Il a appris son métier (de vigneron) avec Henri Jayer alors métayer du domaine Méo-Camuzet, il y a pire comme prof. Etrangement, Jean-Nicolas n’en parle pas volontiers, comme s’il fallait gommer ce passé prestigieux pour se concentrer sur ses réalisations à lui. Le fils tuerait le père, comme souvent. Et, au fond, c’est assez normal, tuons les pères.
Histoire d'engager la conversation sur une note badine, un de mes confrères tout empêtré dans la crise lui dit : "alors, vous passez plein de coups de fil pour vendre du vin en ce moment ?" La réponse, détendue : "pas encore, mais j'ai prévu de le faire dans les deux mois qui viennent. Un ou deux pour être tranquille." C'est clair, il n'a rien à vendre, ou très peu. Son vin, il n'y en a pas beaucoup et tout le monde en veut. D'ailleurs, chacun de nous était prêt à lui en prendre deux caisses.
Nous avons goûté quelques 2007, parmi lesquels les remarquables grand cru clos-de-vougeot et premier cru vosne-romanée Aux Brûlées. Si le premier est soyeux et le second, puissant, ils affichent tous les deux une complexité qui donne la réplique à une bouche pleine, vive. Nous sommes là devant deux très grands vins, de ceux qu’on oublie pour des siècles (quinze ans) à fond de cave et qu’on retrouve le cœur palpitant d’émotion. De ceux qu’on réserve au premier cercle de ses amis les meilleurs. Les vins qui ont accompagné le déjeuner après cette dégustation, les mêmes en 2001 pour le clos-de-vougeot et 1996 pour le vosne-brûlées, ont confirmé cette aptitude magnifique à se révéler avec le temps. Même là, ils étaient encore trop jeunes, dotés d’une belle acidité et d’une fraîcheur inattendue. Mais quel plaisir, déjà. Ces vins de longue garde sont issus d’une toute petite production, quelques milliers de bouteilles, et les prix dépassent largement les 100 euros le col. C'est un prix élevé mais il faut savoir ce qu'on veut.

Pour info : le domaine Méo-Camuzet, comme la plupart de ses pairs, commercialise des vins issus des vignes du domaine et d'autres élaborés avec des raisins achetés ou des vignes louées, ce qu'on appelle le négoce. Ainsi, les vins marqués Domaine Méo-Camuzet sont ceux de la propriété et ceux marqués Méo-Camuzet Frére & Sœurs sont des vins de négoce. Ne pas en conclure qu'il s'agit de vins "moins", mais le distingo est important quand même.

La photo : Jean-Nicolas Méo dans son cuvier à Vosne-Romanée,
photographié par Mathieu Garçon

jeudi 29 janvier 2009

Petits bordeaux et grand ministre

Aujourd’hui, 29 janvier 2009, jour de grande grève, Paris est paisible comme autrefois au mois d’août. Chez Ledoyen, une cinquantaine de journalistes sont réunis pour déguster les bordeaux et bordeaux supérieurs 2006. L’organisation professionnelle en charge en profite pour décerner un prix au journaliste qui a le mieux parlé du vin. Cette année, il est double, Denis Saverot et Benoist Simmat pour « In vino satanas », excellent bouquin qui décortique les raisons de la lente descente aux enfers du vin dans notre pays. Dans son petit discours de remerciements, Saverot rappelle notamment que la France a troqué sa place de premier pays consommateur de vin pour celle de premier pays consommateur d’anti-dépresseurs et conclut drôlement en disant que « chaque fois qu’un bistrot ferme, une pharmacie ouvre ». Dans le livre, il explique aussi qu’il faut être aveugle pour ne pas y voir la patte des lobbies de l’industrie pharmaceutique. Lisez-le.
Mais cela ne serait qu’une énième petite colère entre nous si le ministre Darcos n’avait pas été là. Le discours de Saverot s’adressait, en priorité, à lui. Le patron de l’Education nationale a repris le micro sans se faire prier et après quelques développements sur le ton patelin de l’élu en campagne permanente, il déclara : « c’est notre devoir de transmettre la culture du vin ». De vous à moi, c’est une banalité de plus. Mais dans l’environnement paranoïaque qu’ont créé les lobbies hygiénistes, cette phrase déclencha un tonnerre d’applaudissements. D’autant qu’ayant pris soin de déclarer qu’il ne parlait pas en son nom personnel mais es-fonctions, chacun y alla de son compliment, louant son courage. Pour vous et moi, bien sûr, il n’a fait que son travail, celui pour lequel il est nommé. Mais bon, c’est déjà ça de pris. Et les bordeaux sup ? Ah oui, the winner is la Ronde des Ormes, il vaut 9 euros. Moi je l’avais classé troisième, nobody’s perfect. Mon voisin de table, un très jeune vigneron qui fait un bon petit bordeaux à 4,60 euros port compris (Château Majoureau à Caudrot), m’a dit qu’il n’aimait pas Sarkozy. Et pourquoi, s'il vous plaît ? « Il n’est pas assez rural »…

mardi 27 janvier 2009

Avec Enrico


C’est de Enrico Bernardo qu’il s’agit. Il recevait le propriétaire du Domaine Changarnier, six hectares à Monthélie (prononcez Mont’li). Ce monsieur Changarnier a décidé de reprendre un domaine - familial depuis deux siècles - sans quitter ses fonctions de vice-président administratif et financier « monde » de Microsoft (chez les mega-mergers, monde veut dire reste du monde et ne compte pas les USA). A ce moment de son vignoble, il a bien fait… Et donc, il a repris les rênes de l’affaire et s’est adjoint les services d’un certain Laurent Goillot. Celui-là il revendique ce qu’il a fait, à savoir les millésimes 07 et 08 du domaine. Et c’est plutôt pas mal du tout, beaucoup mieux que les millésimes précédents. Ce n’est pas la grande histoire du siècle mais à13 euros le monthélie blanc 07 et 15 euros le rouge 07, c’est un parfait rapport qualité-prix comme on dit dans la RVF. Ce serait dommage de le rater. On ne le conservera pas en cave pendant 107 ans, mais trois à cinq, oui. Et nous étions chez Il Vino, le restaurant chic du wonder-boy de la sommellerie mondiale, Enrico Bernardo, meilleur sommelier du monde (USA compris cette fois) 2004. Après un passage par le George-V, Aix-en Pro puis Cassis, il a ouvert Il Vino il y a un an et quelques avec plein d’idées dans la tête, dont certaines ont affolé les critiques gastro (le menu à 1000 euros). Assez pour se faire mal voir. Ce qui ne l’empêche nullement de travailler et de travailler bien. Entouré d’une fine équipe de fidèles, Enrico mène sa barque intelligemment. Il Vino est une adresse agréable de fine gastronomie. Comme tous ces endroits en accélération, il pêche par une certaine inconstance. Il faut du temps pour se caler, beaucoup moins pour se faire éreinter. Nous, nous ne crions pas haro sur le baudet, chaque fois que nous y allons c’est mieux que la fois d’avant. C'est une bonne raison pour y retourner.

La photo : Enrico Bernardo, photographié à Cassis par Mathieu Garçon

lundi 26 janvier 2009

Pauillac et tempête


Jamais en retard d’une idée pour vendre, les Bernard père & fils (Millesima) ont convoqué à Bordeaux leurs clients (des particuliers) et quelques représentants de la presse pinardière (nous étions huit) pour goûter deux ou trois millésimes de tous les pauillacs qu’ils commercialisent. C’est clair, il n’y avait pas tout le monde. Aucun premier cru, en particulier. Comme il faut que personne n’ignore la somme impressionnante de caisses stockées par Millesima, nous avons dégusté dans le chai. Il y faisait un petit 11°. Les vins étaient à 11°, d’accord ? En cette veille de tempête historique, nous sommes arrivés à l’heure sous une pluie battante, en même temps que les propriétaires ou leurs représentants, chacun s’affairant à ouvrir les bouteilles avant de remplir nos verres. Bref, vraiment pas des conditions idéales pour une dégustation : des vins pas aérés et glacés. Même chez vous, vous faites mieux alors que personne ne vous regarde. Cela dit, on ne peut pas en vouloir à Patrick Bernard de nous montrer ses chais, c’est ce qui fait sa différence avec un certain nombre d’opérateurs du marché qui vendent à découvert, c’est-à-dire des vins qu’ils n’ont pas. Lui, il les a, les vins sont chez lui, livrables, disponibles pour de vrai. Pas si mal par les temps qui courent.
Parmi les 44 vins (seize propriétés) soumis à notre appréciation, on a vu des écarts qualitatifs incroyables. Ce n’était pourtant que du pauillac et rien d’autre. Où l’on se dit que les tenants de l’appellation feraient bien de faire un peu de ménage pour niveler par le haut. Le haut, puisqu’on en parle, c’est sans aucun doute les vins de Pontet-Canet. Dans une dégustation, on recrache tout sous peine de se faire beaucoup de mal. Mais le pontet-canet 2004, je l’ai bu. Deux gorgées même. Et le second vin, les hauts de pontet-canet, est dans le sillage du premier vin. Le genre de second vin qui dépassait de la tête et des épaules bon nombre de premiers vins dégustés ce soir-là. Juste derrière pontet-canet 2004 (mais derrière) venaient lynch-bages 1999, un nez merveilleux, Pichon Baron 2003 pour sa longueur et batailley 2004 pour sa bouche très bavarde.
Le lendemain, TGV retour vers Paris. Bien rentrés, merci. La tempête a frappé le soir même avec les dégâts que l’on sait. Si quelques châteaux bordelais y ont laissé des plumes (des tuiles, en fait), le vignoble (végétatif) n’a sans doute pas souffert des forts vents. Les palissages, peut-être ?

Pour info, 2004 chez Pontet-Canet, c’est le premier millésime en biodynamie. Et Pontet-Canet est la première propriété bordelaise à traiter en biodynamie un grand cru classé en 1855. Bravo Alfred Tesseron, c'est du beau travail.

La photo : Alfred Tesseron, propriétaire de Pontet-Canet, photographié par Mathieu Garçon