Le blog de Nicolas de Rouyn

Bonjour.
Ceci est un blog dédié au vin et au monde du vin, qu'on appelle aussi le mondovino. Et à tout ce qui entoure le vin, les belles tables,
les beaux voyages, les tapes dans le dos et les oreilles tirées.
Cela posé, ce qu'on y lit est toujours de-bon-goût-jamais-vulgaire,
ce qui peut plaire à votre mère. Dites-le lui.
(Only dead fish swims in ze stream).
Les photos sont signées Mathieu Garçon, sauf mention. Pour qu'elles soient belles en grand, il suffit de cliquer dessus.
Au fait, il paraît que "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération".
Nicolas de Rouyn



samedi 4 décembre 2010

Du talent et autres fatigues


« Ce qui est tragique, c’est qu’il faut toujours donner des preuves de son talent à des gens qui n’en ont aucun. » Trouvé ce mot d’Antonioni (le réalisateur, ah, Italia bella, comme tu nous manques, il faut l'Italie l'hiver aussi) en exergue du chapître Quatorze automnes et quinze étés dans le magique bouquin de Jules Gassot, surtout connu comme fils de l’excellent Charles du même nom, mais ça va changer, même le ELLE en parle, ce qui est normal puisque le jeune homme est joli garçon. Le livre s’appelle Manuel de savoir-vivre à l’usage des jeunes filles* et j’en recommande vivement la lecture. Aux jeunes gens, évidemment. Les jeunes filles savent déjà tout.
Revenons à nos moutons. Le mot du maestro m’a remis en tête une scène vue à l’occasion d’une pauvre réunion du Wine Business Club dont je n'avais pas du tout l'intention de parler. Dans ces machins-là, une conférence, une dégust, un dîner. La conf' avait un beau sujet et moi, le pigeon, j’y ait été pour ça. Les Français peuvent-ils encore s’offrir le luxe qu’ils produisent ? Bonne question, c'est du lourd, non ? Les quatre intervenants dont je tairai le nom par charité n’ont pas donné la réponse. Dommage. Deux représentants d’une inter-pro, une modeuse de petite notoriété et un directeur d’hôtel. On étouffe deux ou trois bâillements, on gèle dans le palace, on se tortille sur sa chaise droite, ils vous servent le rien en une heure quand même. Et place à la dégust. Un champagne de grande diffusion, un cognac de la même eau, un bordeaux sup de très belle qualité, si, si, et deux vins du Rhône, magnifiques, avec le producteur derrière la table qui sert les verres à un public qui fait semblant. C’était le très talentueux Yves Cuilleron, bien peu à sa place en pareille assemblée. Il fait partie de la bande des surdoués qui agitent le septentrion du grand fleuve avec ses potes – et parfois associés – Villard, Gaillard, Villa et consorts, ceux de chez Ferraton, d’autres, cette génération. Que du bon, l’honneur de la viticulture française. Et moi, ce soir-là, j’avais mal pour lui, sa sincérité, ses beaux vins authentiques pas compris par un public qui s’en fout ou, pour être aimable, qui n’était pas là pour s’intéresser. Donner des preuves de son talent à des gens qui n’en ont aucun, même pas la reconnaissance minimum, est une tragédie maintes fois jouée par les meilleurs acteurs du vin français, qui se demandent sans doute ce qu’ils font là. Il y avait même Xavier Planty, auteur du sublime sauternes château-guiraud, venu sans ses vins, pas grave le garçon est ultra-sympathique, drôle, encore un talent et nous étions bien contents de nous retrouver au milieu de la petite foule inconnue. Le dîner a fait partie de ces moments dont, par chance, on ne se souvient jamais malgré les efforts et le talent, encore un, de David Cobbold qui s'échinait à intéresser les dîneurs à ce qu'ils buvaient. En pure perte, c'était pas le jour.

* Manuel de savoir-vivre à l’usage des jeunes filles, de Jules Gassot chez Stéphane Million Editeur, 286 pages, 17 euros.
La photo : pour une fois, ce n'est pas Mathieu Garçon qui a signé ce portrait d'Yves Cuilleron. Je l'ai trouvé sur le site gobeleteurs.fr que je vous recommande.

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