Le blog de Nicolas de Rouyn

Bonjour.
Ceci est un blog dédié au vin et au monde du vin, qu'on appelle aussi le mondovino. Et à tout ce qui entoure le vin, les belles tables,
les beaux voyages, les tapes dans le dos et les oreilles tirées.
Cela posé, ce qu'on y lit est toujours de-bon-goût-jamais-vulgaire,
ce qui peut plaire à votre mère. Dites-le lui.
(Only dead fish swims in ze stream).
Les photos sont signées Mathieu Garçon, sauf mention. Pour qu'elles soient belles en grand, il suffit de cliquer dessus.
Au fait, il paraît que "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération".
Nicolas de Rouyn



mercredi 13 septembre 2017

Marc Monrose et cette envie de bien faire

Quand Roger Zannier visite le château viticole Saint-Maur à Cogolin pour la première fois, il n’est pas comme nombre de ses pairs à la recherche d’une « maison de vacances exceptionnelle avec piscine ». Non, vingt ans plus tôt, en 1991, il avait investi dans un beau domaine du Douro portugais, la quinta de Pessegueiro où il produisait des vins secs sous la nouvelle (1979) appellation Douro. Des vins élaborés sur le conseil de Jean-Michel Cazes (Lynch-Bages) par la célèbre et très qualitative Quinta do Noval. Le vin, sa production, son commerce, il savait ce que c’était, il n’a pas découvert les vignes du château Saint-Maur au moment de signer chez le notaire comme cela arrive parfois. Et le voisinage avantageux de Saint-Tropez agissait plus comme une opportunité de marketing que comme un aimant people. La belle histoire était là était là.


Marc Monrose, photographié à Paris



Qui est Roger Zannier ? Un fils de maçon italien établi à Saint-Chamond, entre Lyon et Saint-Étienne. Là, un beau jour, il achète deux machines à coudre et lance une activité de confection et à force de travail et de bonne fortune, il est aujourd’hui à la tête d’un empire dans le secteur du vêtement pour enfants et de la mode. Chacun connaît ses marques, de Kickers à Z, de Tartine & Chocolat à IKKS. S’il en a cédé certaines, toutes ont contribué à sa gloire. On l’a connu aussi à la tête de Z, une équipe cycliste, mais c’est fini. Son fils Arnaud développe un pôle hôtellerie et c’est son gendre, Marc Monrose, qui a la responsabilité des vignobles familiaux et que nous rencontré à l’occasion d’un de ses passages à Paris, entre deux avions, entre deux marchés d’export. Sa vie a basculé à l’occasion d’une visite dans les vignes portugaises de son beau-père. Est-ce la beauté austère et un peu étrange du Douro, l’appel du changement de vie, la qualité des vins produits ? Nous sommes en 2006 et il s’inscrit illico à l’université de Dijon, sa ville natale, et trois mastères plus loin, il cède ses affaires personnelles et le voilà aux commandes des vignobles Zannier, à plein temps à partir de 2009. Huit ans déjà. Un premier constat ? « Le plus dur avec les vins portugais en, France, c’est de les vendre ». Alors, il croche dedans, s’efforce autant qu’il est possible, change de pied et, peu à peu, le succès s’organise. Il a compris que quand on n’est pas une famille du vin « On ne vend pas de vin, mais du rêve, des souvenirs, des idées, des sensations ». Pourtant, il est dans le réel quand il conseille à son beau-père d’agrandir la propriété de plus du double (de 11 à 30 hectares), d’acheter un terrain pour construire une cave ultra-moderne et de mener des études sur la structure parcellaire du vignoble, l’adéquation des méthodes et des cépages aux sols, avant de reprendre l’élaboration des vins à la quinta, plutôt que chez Noval. Marc Monrose a d’abord été enthousiasmé par les compétences des équipes en place à Pessegueiro depuis les premiers jours de l’exploitation sous la gouvernance Zannier. D’abord, ils sont toujours là, ce qui est un signal fort tant sur l’endroit que sur le patron. Ensuite, dit-il, « Chacun, là-bas, a une culture du vin exceptionnelle. Ils ont tous quelques vignes pour leur consommation personnelle et ils revendent des raisins en état sanitaire parfait. » Pourtant, c’est parfois compliqué, la viticulture locale. Sur certaines parcelles de vieilles vignes, on trouve jusqu’à 70 cépages différents sur un seul hectare. D’où l’importance de replanter de grandes parcelles de touriga nacional, le cépage noble du Douro. Et puis, à force d’entêtement, le nouveau chai est sorti de terre. Sa tour de 23 mètres de haut abrite un cuve-ascenseur. En 2011, pour la première fois, Pessegueiro a produit un porto, « Nous avons profité du millésime exceptionnel pour déclarer un vintage. » Aujourd’hui, Marc Monrose produit deux grands rouges secs, Aluze et Quinta do Pessegueiro. En 2011 encore, il a sorti une cuvée d’exception baptisée Plénitude et vendue 60 euros, un prix très élevé pour un rouge du Douro. Cette cuvée a de nouveau été produite en 2015 pour 3 000 bouteilles. En tout, 120 000 bouteilles et quelques pots de miel sortent chaque année de Pessegueiro, objectif 150 000. L’un des atouts maîtres de Marc Monrose est son consultant, l’impeccable Éric Beaumard, surtout connu pour être un sommelier hors pair et le directeur général de l’hôtel George V à Paris. Il aurait pu choisir de travailler avec l’un ou l’autre de nos grands consultants, ces flying winemakers que le monde s’arrache, mais non, il a préféré s’entendre avec un sommelier, c’est une idée neuve, mais pas unique. D’autres en font autant. C’est aussi en 2011 que Vignobles Zannier acquiert le château Saint-Maur. Ce vignoble est inscrit au classement des crus de Provence de 1955, ce qui n’a pas grand sens, mais confère une certaine crédibilité dans le public. Dès l’affaire conclue, Marc Monrose se met au travail. Une nouvelle cave sort de terre pour le premier millésime du nouveau Saint-Maur en 2013. Marc s’enthousiasme : « Je veux vendre du vin à Saint-Maur, comme on vend du champagne. » Déjà, avec des bouteilles originales, il en revendique les codes. Et les volumes. De 2013 à 2016, il est passé de 80 000 bouteilles à 400 000. Et, comme si tout ceci ne suffisait pas, il a créé un rouge en 2015. De ses trois cuvées, il tire beaucoup de fierté, content aussi des prix de vente acceptés par le public et les cavistes, 10, 18 et 32 euros, c’est déjà très bien. On sent l’homme en pleine phase avec ses défis, le succès est au coin de l’histoire, la sienne. Il conclut : « C’est le plus beau métier du monde, l’égal des orfèvres ou des denteliers ». Bien vu.

La photo : Mathieu Garçon

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