Le blog de Nicolas de Rouyn

Bonjour.
Ceci est un blog dédié au vin et au monde du vin, qu'on appelle aussi le mondovino. Et à tout ce qui entoure le vin, les belles tables,
les beaux voyages, les tapes dans le dos et les oreilles tirées.
Cela posé, ce qu'on y lit est toujours de-bon-goût-jamais-vulgaire,
ce qui peut plaire à votre mère. Dites-le lui.
(Only dead fish swims in ze stream).
Les photos sont signées Mathieu Garçon, sauf mention. Pour qu'elles soient belles en grand, il suffit de cliquer dessus.
Au fait, il paraît que "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération".
Nicolas de Rouyn



mardi 21 décembre 2010

La blouse d’Agathe


C’était la dernière heure du Grand Tasting, Agathe Bursin et sa maman couraient les allées à la recherche d’un responsable. « On déborde », le trouble était de taille. Locataires d’un stand partagé avec un autre vigneron, elles regrettaient que la foule des amateurs de ses vins empiètât sur le demi-stand du voisin. Le responsable éclata de rire, le rire libérateur qui salue le succès, mais ni Agathe ni sa maman ne trouvaient ça drôle. Elles étaient embarrassées pour de vrai.
« Nous ne pourrons plus revenir », concluaient-elles d’une même voix désolée. Elles s’imaginaient déjà au ban du Grand T et du mondovino tout entier, fautives qu’elles étaient, leur réussite faisait du tort au voisin.
La blonde Agathe Bursin a pu ainsi vérifier qu’elle est une vedette. Elle n’y croit pas du tout. Cette jeune fille, installée dans la maison familiale du petit bourg de Westhalten en Alsace, a commencé à écrire son conte de fées en 2000, sur 2,7 hectares de jolis coteaux, l’un des endroits les plus secs de France, d’où la végétation un peu méditerranéenne. Elle avait 24 ans, un diplôme d’œnologie et une ascendance porteuse, « mon grand-père m’a tout appris ». Première récolte, les bonnes notes de Parker, un importateur américain débarque un dimanche matin, « j’étais en pyjama », et achète les 2000 bouteilles qui constituaient l’entier de la production, « je n’avais même pas d’étiquette ». Agathe, en blouse blanche, s’amuse des drôleries de l’existence : « J’ai toujours été anti-Coca, anti-McDo, anti-Monsanto et voilà que c’est l’Amérique qui me fait confiance en premier ». Dans la foulée, c’est Michel Bettane qui en fait une icône du Grand guide des vins de France, un splendide 17,5 sur 20 pour son vendanges-tardives, Agathe Bursin et ses yeux bleus sont lancés.
Mais elle continue à faire tout, toute seule sur ses quatre hectares, « Si je passe à cinq hectares, il me faudra quelqu’un ». En attendant cet avenir qu’on ne sent pas au programme, elle décrit sa vision de dentellière. Pas moins de 28 parcelles sur ses quatre hectares, soit 28 cuves au chai pour des vinifications dédiées (ceux qui ne sont pas au fait de ces complications techniques doivent comprendre qu’il s’agit d’une parcellarisation extrême). Et 15 cuvées différentes pour 25 000 bouteilles en tout. On se croirait en Bourgogne, on est bien en Alsace. Elle pousse le bouchon de l’exigence très loin, « en dix ans, je n’ai fait que deux cuvées Sélections de grains nobles. 2006 et 2009. » Plus tard, elle parlera du goût protestant du riesling, « plus droit » que le gewurztraminer, cépage des villages catholiques, mais « maintenant, tout le monde a tout » ajoute-t-elle avec un bon sourire avant de préciser « Je n’aime pas le côté racoleur des gewurz, je les vinifie dans la retenue ». Bon, mais cette parpaillotte – donc – aime bien la vie quand même, et ses plaisirs, « Agnès b. vend mon vin dans sa boutique de Hong Kong, parce qu’on a les mêmes initiales ». Comme quoi.

La photo : Agathe Bursin sous le portrait de son arrière-grand-mère, photographiée par Mathieu Garçon en juillet 2010

1 commentaire:

  1. Et moi en 2008 ! Agathe et d'autres, dont Pierre Frick, alors que je déguste son Auxerois 2006, embouteillé en 2011 et qui me transporte, font la vérité du terroir alsacien. Leur énergie est tout à fait remarquable, les gentils "confrères" ne leur faisant aucun cadeau... Alors partageons, partageons jusqu'à plus soif !

    RépondreSupprimer