Le blog de Nicolas de Rouyn

Bonjour.
Ceci est un blog dédié au vin et au monde du vin, qu'on appelle aussi le mondovino. Et à tout ce qui entoure le vin, les belles tables,
les beaux voyages, les tapes dans le dos et les oreilles tirées.
Cela posé, ce qu'on y lit est toujours de-bon-goût-jamais-vulgaire,
ce qui peut plaire à votre mère. Dites-le lui.
(Only dead fish swims in ze stream).
Les photos sont signées Mathieu Garçon, sauf mention. Pour qu'elles soient belles en grand, il suffit de cliquer dessus.
Au fait, il paraît que "l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération".
Nicolas de Rouyn



dimanche 19 février 2012

Des grands vins, de très grands, des petits


Un samedi d’après les gelées, un samedi qui ne dit pas encore le printemps, deux heures de train-corail, nous voici à Chateauroux, cette France qui existe encore, les rues basses et les petites maisons charmantes. Au bout de la promenade, Denis et Frédérique Hervier attendent leurs invités. Il est midi, c’est l’heure du déjeuner dans ces pays où les habitudes qui font les équilibres, celles qui ont à voir avec la course du soleil, n’ont pas encore lâché la rampe.


Ce qui est prévu, ce n’est pas n’importe quel déjeuner, c’est un rendez-vous de longue date, une affaire d’hiver, de truffes et de grands vins, de très grands même. Une réunion de gourmands, des vins dans les bras des uns, des truffes pour les autres. Nous étions neuf, avons ouvert treize bouteilles, repoussé une au motif d’un (petit) défaut, ces amateurs ont de l’exigence et le compte est bon.




Tout a commencé avec un Amour 02 de Deutz, la fine pétillance d’un joli blanc de blancs pour remettre les papilles en place et, très vite c’est un coulée-de-serrant 85, en dessous des attentes et diversement apprécié, mais meilleur le lendemain, suivi d’un Brézé 03 du Clos Rougeard. C’est ce dernier qui a pris le chemin du vinaigrier, une activité très suivie dans cette maison. Il a fait place à un Foudre, saumur 10 du château du Hureau, épatant, C'est lui qui a remporté la mise, à la fin, et qui a réconcilié tout le monde avec son verre.
Il était temps de passer à table.
Tout autour se répartissent les Hervier, Babeth et Pierre-Jean Pebeyre, professionnels de la truffe, Jean-Claude Berrouet, le grand homme de Petrus, son fils Jean-François, il s’occupe des domaines familiaux, et sa fiancée Diana, Espagnole et œnologue à Teynac en saint-julien et à Corconnac dans le Médoc, et nous.


L’ordre de service des vins et les accords est très vite tranché. À l’envers de ce qui se pratique généralement, on commencera par le plus vieux, un pétrus 82, monument de suavité et de longueur, un vin qui n’a pas fini d’enchanter ceux qui auront la chance d’y tremper leurs lèvres. Jean-Claude Berrouet est ravi de la qualité de cette bouteille, goûtée avec un foie gras très truffé. Il sera suivi d’un lafleur-petrus, puis d’un haut-bailly et d’un château-margaux, tous de 1988. De très grands vins qui partagent la table, chacun a sa préférence, j’ai eu un gros faible pour le margaux. Denis a sorti une rareté, le château-des-trois-chardons, petite propriété de trois hectares qui vient d’être acquise par Palmer, un vin d’excellence, malgré son très jeune âge (2010) et une curiosité. Au moins, ces nouveaux raisins qui entreront dans l’élaboration du grand palmer font un vin très fin.
Mais, en fait, la conversation n’a pas vraiment porté sur les vins que nous buvions, même si chacun y a été de son petit commentaire, en désordre et sans l’ambition de convaincre à tout prix, des bavardages de salon très agréables.



Et nous sommes passés aux blancs, un ordre de service traditionnel des tables bordelaises, puisque « blanc sur rouge, rien ne bouge ». Dans l’ordre, deux grands bourguignons, un clos-des-mouches Ouvrée des dames 05 et un chevalier-montrachet 09 domaine de chez Bouchard Père & Fils. Deux très grandes bouteilles, l’une plus évoluée que l’autre, tous les deux des monstres de complexité et de maîtrise, ils ont fait merveille sur une lotte parfaitement cuite et ensevelie sous une épaisse couche de truffe. Les fromages, un pouligny et un valençay (et des truffes, oui), se sont arrangés d’un splendide Silex 07 de Didier Dagueneau. Pour finir sur une note de fraîcheur (!), c’est un Première vendange de Marionnet qui est chargé de faire le boulot. Moi, j’aurais bien fini sur un vieux sauternes, mais bon, nous sommes dans la Loire, m’objecte-t-on. Dans ce cas… La prochaine fois, c’est promis, un quart-de-chaume sera au rendez-vous.


Voilà un déjeuner rare, splendide. Une approche des vins reposante, où il n’est jamais question que du plaisir que l’on se fait, où personne n’a fait le beau, un vrai déjeuner d’amateurs ponctué de rires et de silences inspirés, un grand moment simple où, même si chacun a une conscience très aigue du privilège qui est le sien, personne n’en fait des tonnes.

Pour info, Jean-Claude Berrouet a confié les rênes de Petrus à son fils Olivier et comme beaucoup de grands vinificateurs à la retraite, il a inauguré une nouvelle vie de consultant (pour La Conseillante à Pomerol, entre autres) et il épaule son fils Jean-François au Vieux Château Saint-André à Montagne.

7 commentaires:

  1. Un Breze de Nady au vinaigrier...Vous nous expliquez....

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    1. Ce vin a fait l'unanimité contre lui au grand regret de chacun. Il existe des bouteilles défectueuses, hélas.

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  2. C'est ce qui s'appelle une journée à marquer sur le calendrier.

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  3. Oui. Et Denis Hervier me précise que le trois-chardons était un 2006, pas un 2010. Ce qui prouve bien qu'à un moment, un certain flottement s'installe…

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    1. Et oui, 2006 est la dernière année de production puisque Palmer à récupéré ce petit bijou en 2007!

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  4. Bien aimé pour ma part le Brézé 2003 du Clos Rougeard (bouteille bue en juin 2008). Pas de bois envahissant et pièges du millésime évités.

    Coulée de Serrant 1985 :
    a. excellente à grande dans la verticale du domaine (juin 2005)
    b. excellente en déc 2008 (dans une série de vins de France de ce millésime).

    Pour finir dans la gourmandise, il vous aurait fallu les splendides Climens 83 ou Sigalas-Rabaud 1914, Nicolas !

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